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Catégories socioprofessionnelles et structure sociale

Dissertation

Catégories socioprofessionnelles et structure sociale

4 heures

20 points

Intérêt du sujet • Ce sujet met en lumière les catégories socioprofessionnelles qui ont longtemps été considérées comme le seul facteur pour définir un espace social hiérarchisé. Or d'autres critères existent.

 

 Dans quelle mesure les catégories socioprofessionnelles restent-elles un instrument pertinent pour définir une structure sociale hiérarchisée ?

Document 1Les catégories socioprofessionnelles

Le Code des catégories socioprofessionnelles (CSP) élaboré par Jean Porte en 1951 a constitué pendant près de 30 ans la principale grille de lecture du monde social […]. Cette classification n'a pas été construite à partir d'une théorie sociologique mais plutôt de façon pragmatique, dans le but d'obtenir des corrélations assez fortes entre les personnes classées et des groupes de pratiques sociales différenciées. Elle repose sur un classement de la population en [groupes] socioprofessionnels […] qui sont subdivisés en une trentaine de catégories, selon un découpage qui combine plusieurs critères. […] Le succès de cette nomenclature tient en partie au fait qu'elle a pu formaliser des représentations sociales déjà fortement ancrées dans la société. De plus, elle présente l'intérêt d'être exhaustive, dans le sens où chaque individu – actif ou inactif – peut être identifié à la catégorie qui lui correspond. C'est d'ailleurs à ce titre qu'elle a constitué le support scientifique de nombreux travaux sociologiques et politiques faisant de l'appartenance de classe le critère principal d'identification dans l'espace social. […] Le Code des catégories socioprofessionnelles (CSP), réalisé à l'occasion du recensement de 1954, a d'abord été utilisé par les statisticiens de l'Insee pour formaliser le lien entre une appartenance professionnelle et des comportements économiques, démographiques et sociaux. Dès les premiers temps, il est utilisé pour mesurer l'évolution des structures sociales, les trajectoires professionnelles et les formes de mobilité sociale.

Source : Emmanuel Pierru et Alexis Spire, « Le crépuscule des catégories socioprofessionnelles », Revue française de science politique,
vol. 58, no 3, 2008.

Document 2Niveau de vie médian1 selon la catégorie socioprofessionnelle (en euros 2017 constants)

Tableau de 7 lignes, 7 colonnes ;Tetière de 1 lignes ;Ligne 1 : ;2012;2013;2014;2015;2016;2017;Corps du tableau de 6 lignes ;Ligne 1 : Agriculteurs, artisans, commer­çants, chefs d'entreprise; 20 350; 19 960; 19 540; 20 310; 20 550; 20 610; Ligne 2 : Cadres et professions intellectuelles supérieures; 33 520; 32 740; 32 800; 33 170; 33 240; 33 090; Ligne 3 : Professions intermédiaires; 24 550; 24 440; 24 120; 24 210; 24 560; 24 520; Ligne 4 : Employés; 19 530; 19 600; 19 620; 19 720; 19 590; 19 720; Ligne 5 : Ouvriers; 18 660; 18 590; 18 760; 18 670; 18 860; 18 870; Ligne 6 : Ensemble des actifs ayant déjà travaillé; 22 100; 22 010; 21 940; 22 160; 22 290; 22 340;

Sources : Enquêtes Revenus fiscaux et sociaux, Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, 2012 à 2017.

1. Niveau de vie par rapport auquel 50 % d'une catégorie socioprofessionnelle a un niveau de vie inférieur et 50 % un niveau de vie supérieur.

Document 3Revenu salarial mensuel moyen des hommes et des femmes en 2015 (en euros)

sesT_2000_00_29C_01

Source : lafinancepourtous.com, d'après l'Insee, 2019.

Document 4Quelques caractéristiques des quartiers prioritaires (en %)

Tableau de 4 lignes, 3 colonnes ;Tetière de 1 lignes ;Ligne 1 : ;Quartiers prioritaires métropolitains1;Unités urbaines environnantes2;Corps du tableau de 3 lignes ;Ligne 1 : Taux de scolarisation des 16-24 ans; 52,9; 63,9; Ligne 2 : Part des emplois précaires; 21,4; 14; Ligne 3 : Part des familles monoparentales; 24,1; 17,6;

Source : Portrait des quartiers prioritaires, Observatoire national de la politique de la ville, 2016.

1. Les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) sont des territoires sur lesquels le revenu moyen par habitant est faible.

2. Les zones urbaines environnantes sont les quartiers non prioritaires à proximité des quartiers prioritaires.

 

Les clés du sujet

Analyser la consigne et dégager une problématique

sesT_2000_00_29C_02

Problématique. Quels sont les facteurs autres que les catégories socioprofessionnelles pour définir une structure sociale hiérarchisée ?

Exploiter les documents

Document 1. Ce texte retrace l'histoire de la nomenclature des catégories socioprofessionnelles (CSP). Sur quels critères repose-t-elle ? Par qui est-elle utilisée ? Pourquoi ?

Document 2. Ce tableau compare les revenus médians selon la CSP. Quelles inégalités met-il en lumière ? Comment celles-ci évoluent-elles ?

Document 3. Ce graphique représente le revenu salarial moyen selon le sexe. Quelle différence fait-il apparaître ? Qu'en déduire de l'influence du genre sur la hiérarchisation de l'espace social ?

Document 4. Ce tableau distingue un certain nombre de caractéristiques sociales selon les quartiers. Quelle est la situation dans les zones prioritaires ? Pourquoi le lieu de résidence peut-il être considéré comme un facteur de hiérarchisation de la structure sociale ?

Définir le plan

Tableau de 2 lignes, 2 colonnes ;Corps du tableau de 2 lignes ;Ligne 1 : I. CSP et structure sociale hiérarchisée; Comment sont construites les CSP ? Que mettent-elles en évidence ? Quels regroupements distinguent-elles ?Sur quel critère les CSP fondent-elles la hiérarchie sociale ? Quelles en sont les incidences ?; Ligne 2 : II. L'existence d'autres critères; Que disent les différences salariales entre hommes et femmes sur la hiérarchie de la structure sociale ?Qu'est-ce qu'un quartier prioritaire ? Quel est le lien entre lieu de résidence et position sociale ?;

Les titres des parties ne doivent pas figurer sur votre copie.

Introduction

[accroche] Depuis les années 1950, la répartition de la population française en catégories socioprofessionnelles (CSP) a connu d'importantes mutations. Cette évolution est assimilée aux transformations de la société. [présentation du sujet] Mais dans quelle mesure les CSP restent un instrument pertinent pour décrire une structure sociale hiérarchisée ? Celle-ci peut être définie comme la différenciation d'une population en groupes sociaux occupant des places distinctes. Les CSP sont une nomenclature reposant sur des critères professionnels et regroupant des personnes aux propriétés sociales communes. [problématique] Se poser la question de la pertinence des CSP comme instrument pour définir une structure sociale hiérarchisée revient à se demander si cette dernière n'est pas déterminée par d'autres facteurs. [annonce du plan] Pour répondre à cette interrogation, nous montrerons tout d'abord que les CSP restent un facteur déterminant d'une structure sociale hiérarchisée, puis nous verrons qu'il existe d'autres critères.

Le conseil de méthode

Le sujet de dissertation fait souvent appel à des notions clés du programme, comme ici « catégories socioprofessionnelles » et « structure sociale hiérarchisée ». Il est alors bienvenu de les définir dès l'introduction. Vous montrez ainsi à l'examinateur que vous maîtrisez les concepts importants du cours.

I. Les CSP, instrument pour définir une structure sociale hiérarchisée

1. La construction des CSP

La nomenclature des CSP est, à l'origine, une construction statistique de l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) reposant sur la situation professionnelle des Français (document 1). Ce classement est déterminé selon un certain nombre de critères : activité ou non, profession, statut, qualification.

Les sciences sociales se sont emparées de cette classification pour étudier la structure sociale. Les CSP permettent de déterminer des « comportements économiques, démographiques et sociaux » (document 1), et de regrouper des personnes ayant des propriétés sociales communes.

2. CSP et hiérarchisation de la structure sociale

L'utilisation des CSP comme instrument de la structure sociale permet de mettre en évidence une hiérarchie fondée sur les professions. Chacune­ d'elles donne en effet accès à des ressources différenciées sur le plan économique. Ainsi, le niveau de vie médian des cadres et professions intellectuelles supérieures est environ 1,8 fois supérieur à celui des ouvriers en 2017 (document 2).

La hiérarchisation économique de la structure sociale s'accompagne d'une hiérarchisation culturelle et sociale. Le niveau de diplôme plus élevé des cadres et professions intellectuelles supérieures leur donne accès à des pratiques sociales et culturelles plus valorisées par la société. Dès lors, on considère que la position sociale de cette CSP est plus élevée que celle des professions intermédiaires, elle-même occupant une position supérieure à celle des employés et des ouvriers.

mot clé

On peut définir la position sociale comme la place occupée par une personne ou un groupe de personnes dans la hiérarchie sociale. Généralement elle est déterminée par le statut professionnel.

II. D'autres critères pour définir une structure sociale hiérarchisée

1. Le genre

Selon l'Insee, en 2015 en France, le revenu salarial mensuel moyen des femmes était inférieur à celui des hommes de près de 25 % (document 3). Ainsi, les premières ont moins accès que les seconds aux ressources valorisées comme le revenu, créant ainsi un autre type de hiérarchie au sein de la structure sociale.

On peut expliquer une partie des inégalités de revenus selon les sexes par la nature des emplois occupés : aux femmes les tâches les moins valorisées socialement comme les activités domestiques, l'aide à la personne, etc. Mais cette explication n'est pas suffisante et ne reflète pas les évolutions récentes. En effet, alors que les femmes sont aujourd'hui plus diplômées que les hommes, elles n'ont pratiquement pas accès aux postes les plus élevés dans l'entreprise. Elles connaissent ainsi une véritable discrimination dans leur vie professionnelle.

à noter

La discrimination est une différence de traitement de personnes ou de groupes sociaux en application de critères pourtant interdits par la loi : genre, handicap, origine ethnique.

2. Le lieu de résidence

L'État, dans le cadre de la politique de la ville, distingue les quartiers prioritaires qui ont pour caractéristique principale une population ayant un faible revenu moyen par habitant. Celle-ci connaît, comparativement aux personnes vivant dans d'autres quartiers, de plus grandes difficultés à accéder à des ressources socialement valorisées, tels l'éducation ou l'emploi. Le taux de scolarisation des 16-24 ans y est moins élevé, la part des emplois précaires plus importante (document 4). Dès lors, le lieu de résidence devient un facteur de hiérarchisation de la structure sociale.

Dans ces quartiers prioritaires, les familles monoparentales sont aussi relativement plus nombreuses (document 4). Or, celles-ci ont le plus souvent des revenus moins élevés et des conditions de vie plus précaires. Outre la ­composition de la famille, d'autres critères peuvent différencier les groupes sociaux, notamment la position dans le cycle de vie en fonction de l'âge : par exemple, les pratiques culturelles sont différentes suivant ce dernier.

Conclusion

[bilan] Les CSP, construction statistique fondée sur la situation professionnelle, restent un instrument caractérisant une structure sociale hiérarchisée. Non seulement elles regroupent des personnes aux propriétés sociales ­communes, mais l'appartenance à une CSP détermine également une position dans la hiérarchie sociale. Cependant, l'appartenance socioprofessionnelle n'est pas le seul critère de différenciation sociale. Le genre (homme-femme) et le lieu de résidence (quartier prioritaire ou non) en sont également des facteurs déterminants. [ouverture] Aujourd'hui, l'espace social voit s'accentuer les inégalités, notamment celles existant au sein même des CSP. Or, cette évolution risque de remettre en cause la cohésion de la société.

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