La vérité
phiT_1409_04_04C
La raison et le réel
26
Antilles, Guyane • Septembre 2014
À mon jugement, la plus grande vérité réside dans les sens, à condition qu'ils soient sains, en bonne santé et qu'on écarte tout ce qui leur fait obstacle et les entrave. Voilà pourquoi nous voulons souvent modifier l'éclairage et la position des objets que nous observons ; nous diminuons ou augmentons leur distance et multiplions les essais jusqu'à ce que la vision elle-même obtienne notre confiance en son jugement. Il en est ainsi pour les sons, les odeurs, les saveurs, de sorte que personne d'entre nous ne réclame pour les sens, chacun dans son espèce, un jugement plus pointu. Quand nous ajoutons l'entraînement et la technique, de manière que notre œil soit retenu par la peinture, notre oreille par les chants, qui ne remarque le pouvoir des sens ! Que de figures les peintres voient dans les ombres et dans les reliefs, mais que nous ne voyons pas ! Que de choses nous échappent en musique, mais qu'entendent les gens exercés dans cet art ! Au premier souffle d'un joueur de flûte, ils disent « c'est Antiope » ou « c'est Andromaque »1, alors que nous n'en aurions pas même le soupçon.
Cicéron, Les Académiques,
La connaissance de la doctrine de l'auteur n'est pas requise. Il faut et il suffit que l'explication rende compte, par la compréhension précise du texte, du problème dont il est question.
Dégager la problématique du texte
Le texte met en relation les sens et l'idée de vérité. La thèse est énoncée dès la première ligne : « la plus grande vérité réside dans les sens ». Cicéron l'assortit toutefois de deux conditions. La problématique du texte se trouve dans ce rapport. Si les sens sont les moyens pour former les jugements les plus justes, il apparaît que cette qualité est conditionnelle. Il faut donc faire des efforts pour les rendre capables d'exercer correctement leur fonction. Nous devons être actifs par rapport à nos sens, qui sont des données reçues de la nature. Nous voyons ainsi qu'il n'est pas simple de former des jugements vrais, même si les instruments par lesquels nous les formons nous sont fournis par notre constitution physique. Pourquoi en est-il ainsi ? Cette thèse de Cicéron ne contient-elle pas une contradiction ?
Repérer la structure du texte et les procédés d'argumentation
- Le texte est divisé en deux parties. La première est constituée par l'énoncé de la thèse et par une première justification. Cicéron accentue le cas de la vue mais précise que ceci vaut également pour les autres sens : « À mon jugement… un jugement plus pointu. »
- La deuxième partie renforce la première en faisant valoir que le « pouvoir des sens » est augmenté par la façon dont nous les exerçons. Leur valeur de vérité est ainsi soulignée.
- Les procédés d'argumentation sont doubles. Cicéron se réfère d'abord à des attitudes courantes. Nous nous préoccupons des conditions de la perception pour améliorer la qualité de nos observations et fonder nos jugements perceptifs.
- Dans un second temps, Cicéron prend des exemples dans le domaine artistique afin de montrer le lien des sens à l'esprit.
- Dans les deux cas, il renvoie son lecteur à des expériences qui peuvent aisément être faites.
Éviter les erreurs
Le texte est facile à lire mais il faut éviter la paraphrase en étant conscient de la difficulté indiquée dans la problématique.
Les titres en couleur servent à guider la lecture et ne doivent en aucun cas figurer sur la copie.
Introduction
Info
L'introduction doit présenter la thèse et le problème qu'elle pose. Il faut citer le nom de l'auteur du texte.
La relation des sens à la vérité est un thème très présent de la philosophie. Il est courant de lire que les sens nous trompent en nous faisant confondre l'apparence et la réalité.
Dans ce texte, Cicéron soutient la thèse opposée. Les sens sont porteurs des
1. La thèse et les premiers arguments
A. Le sens de la thèse
Conseil
Montrez le caractère problématique de cette thèse : son sens et ses conditions.
La thèse de l'auteur est la suivante : les sens sont les principes des jugements les plus vrais. Cela signifie que d'autres principes peuvent exister, mais ils sont moins sûrs. La
Cicéron assortit immédiatement son propos de deux réserves. Les sens doivent être « sains ». Un malade ne doit donc pas être cru. Les sens sont fiables quand le sujet percevant est dans un état
Les obstacles au bon fonctionnement des sens doivent être levés. Cicéron opère un déplacement du sujet qui perçoit aux circonstances
B. L'importance des conditions
La phrase suivante montre que nous ne restons pas passifs face aux informations données par nos sens. Cicéron insiste sur les précautions que nous prenons lorsque nous regardons dans le but de
L'idée importante est la suivante. Il faut faire
Conseil
Sachez montrer la complexité de la thèse, indiquez sa conséquence. Ne suivez pas passivement le texte.
Il faut que la
2. Le rôle de l'exercice
A. L'importance de l'entraînement
Cicéron poursuit son propos en faisant intervenir « l'entraînement et la technique ». Ceci renforce le rôle de l'activité du sujet.
Idée principale : plus nous nous exerçons, plus nous donnons à nos sens le pouvoir de bien juger.
Nos sens sont des
Les exemples sont parlants. Il est clair qu'une sensibilité affinée par la fréquentation continue des œuvres d'art saisit des nuances picturales ou musicales qu'une sensibilité plus grossière ne saisit pas.
B. La révélation de l'esprit par les sens
Attention !
Montrez la gradation du propos. La dernière phrase du texte présente une nouvelle idée.
Une sensibilité exercée permet d'identifier la singularité d'une œuvre. Cette idée permet de dire que les sens ont aussi une valeur
Tout ceci montre qu'on ne doit pas se reposer sur les sensations immédiates, naturelles pour bien juger. Les sens viennent de la nature, ils nous sont donnés mais nous devons les
Conclusion
Sous une apparente simplicité, la thèse centrale de Cicéron se révèle complexe. Elle donne le premier rôle aux sens lorsqu'il s'agit de porter des jugements vrais. Cependant, la raison est requise pour que la vérité soit atteinte.
Il faut prêter attention aux conditions dans lesquelles nous percevons et savoir les faire varier pour dégager des données invariantes. Il est, de plus, requis de cultiver la sensibilité pour que nos sens puissent nous faire accéder à la complexité du réel et à la valeur des créations de l'esprit.