Le vivant • Le passé géologique de notre planète
S’ENTRAÎNER
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France métropolitaine, septembre 2021
Exercice 2
Histoire géologique de la région d’Andlau
Intérêt du sujet • En relevant différents indices présents sur la carte géologique de la région d’Andlau et en les faisant parler, on reconstitue la chronologie de la formation des sols, dont la diversité fait la richesse viticole de la région.
Comme d’autres villages alsaciens, Andlau présente une production viticole qui se caractérise par la diversité des types de raisins produits. Cette dernière s’explique par les différents cépages (variétés de vigne) utilisés ainsi que par la diversité des sols de la région, qui traduit la grande hétérogénéité des roches du sous-sol. Cette hétérogénéité se retrouve à l’échelle régionale.
Expliquer comment la succession chronologique d’événements géologiques permet de rendre compte de la diversité des roches observées dans la région présentée dans le document 1.
Vous organiserez votre réponse selon une démarche de votre choix intégrant des données du document et les connaissances utiles.
DOCUMENT 1Carte géologique simplifiée de la région d’Andlau
Redessiné, d’après la carte géologie de Sélestat 50 000e, la carte de France au millionième et la thèse d’A.-S. Tabaud, 2012
DOCUMENT 2Composition minéralogique de roches du secteur d’Andlau
Les trois roches ont la même composition chimique, mais comportent des minéraux différents.
La présence des minéraux est indiquée par les symboles + dans les cases grisées.
D’après le site planet-terre.ens-lyon.fr
DOCUMENT 3Domaines de stabilité de quelques minéraux repères
Le solidus limite le domaine solide (à gauche) du domaine solide + liquide (à droite).
D’après le site pedagogie.ac-montpellier.fr/svt
DOCUMENT 4Datation absolue de la granodiorite du Hohwald
Un granite se trouvant à proximité et mis en place à la même période que la granodiorite du Hohwald a été daté par la technique de datation absolue U/Pb.
Le graphique suivant présente une portion de la courbe qui indique les combinaisons possibles des rapports des deux radiochronomètres 206Pb/238U et 207Pb/235U ainsi que les âges correspondants en millions d’années.
Sont également données dans le tableau ci-dessous les valeurs de rapports isotopiques pour trois fractions du granite qui a pu être daté. Elles se situent normalement sur une droite dont l’intersection avec la courbe indique l’âge de cristallisation de la roche.
D’après A. Cocherie et al., C. R. Geoscience 336 (2004) et le site planet-terre.ens-lyon.fr
Les clés du sujet
Étape 1. Comprendre le sujet
La carte géologique est le document pivot. Elle présente les formations rocheuses affleurant dans la région d’Andlau. À partir de vos connaissances et, pour les cornéennes et schistes tachetés, des informations extraites des documents 2 et 3, il faut identifier les phénomènes géologiques qui leur ont donné naissance, puis les situer dans un cadre temporel, de manière à les inscrire dans une histoire. Pour cela, il faut appliquer les principes de la chronologie relative.
Ces principes sont aussi utilisés pour situer dans le temps les déformations subies par les formations rocheuses (chevauchement, failles).
Étape 2. Exploiter les documents
Le document 1 donne l’âge de quelques roches, mais fournit surtout des indices qui permettent d’identifier des événements géologiques.
Les documents 2 et 3 permettent d’identifier le phénomène géologique à l’origine des schistes tachetés et des cornéennes.
Le document 4 repose sur une méthode de chronologie absolue différente de celle vue en classe (vous n’avez pas à l’expliciter). Le document indique comment déterminer l’âge absolu de la roche étudiée.
Étape 3. Construire la réponse
Introduction
La carte géologique de la région d’Andlau, établie à partir des observations de terrain de géologues, renseigne sur les diverses formations rocheuses qui affleurent dans cette région et les déformations qu’elles ont subies.
Nous allons identifier les phénomènes géologiques à l’origine de ces formations, et, en appliquant les principes de la chronologie relative, établir leur succession dans le temps. On peut ainsi décrire l’histoire géologique de la région comme une succession d’événements géologiques. En considérant le massif granitique du Hohwald, on verra comment une des méthodes de chronologie absolue permet de donner un âge relativement précis à une formation magmatique.
I. Les formations sédimentaires anciennes (doc. 1)
Le conseil de méthode
Il faut prendre en compte toutes les précisions données dans la légende de la carte pour pouvoir appliquer les principes de la chronologie relative.
Les schistes de Villé et les schistes de Steige sont identifiés comme des roches sédimentaires. Ils résultent donc du dépôt de sédiments dans un bassin qui occupait la région au moment de leur formation. On ne dispose pas d’informations permettant de dire si le milieu était marin.
On observe un chevauchement entre les schistes de Villé et ceux de Steige. Les triangles indicateurs du chevauchement sont orientés vers la formation de Villé, l’identifiant comme l’unité chevauchante. Celle-ci, âgée de plus de 500 millions d’années (Ma), est, d’après la légende, plus vieille que l’unité chevauchée, les schistes de Steige.
Le chevauchement d’une formation sédimentaire par une autre plus ancienne, contraire au principe de superposition, traduit une déformation tectonique caractéristique d’une orogenèse. Le chevauchement, donc l’orogenèse, est postérieur à la formation des schistes de Steige.
II. Les roches magmatiques (doc. 2)
Le conseil de méthode
Ici, commencez par exposer les connaissances sur l’origine du granite qui permettront d’interpréter les informations extraites du document 1.
Les granites sont des roches magmatiques plutoniques. Ils résultent du refroidissement lent d’un magma qui a cristallisé à une profondeur de quelques kilomètres. Ce magma, issu de la fusion partielle de roches préexistantes profondes, est monté vers la surface sans parvenir à l’atteindre.
Les plutons granitiques recoupent les schistes de Steige. Conformément au principe de recoupement, les plutons sont donc plus récents. La légende indique l’âge du granite d’Andlau (– 310 Ma), mais ne renseigne pas sur celui de la granodiorite du Hohwald. Le document 4 permet de l’établir.
Le graphique du document 4 fournit une courbe de référence indiquant l’âge d’un granite en fonction des valeurs de deux couples isotopiques. Trois fractions d’un granite du même âge que la granodiorite du Hohwald sont analysées. Les valeurs des fractions analysées se situent sur une droite dont l’intersection avec la courbe de référence indique l’âge de cristallisation de la roche. En reportant sur le graphique les valeurs fournies sur les rapports isotopiques de ces trois fractions, on constate que la droite reliant les points obtenus recoupe la courbe de référence à 335 Ma, aux incertitudes près.
La granodiorite du Hohwald est donc un peu plus âgée que le granite d’Andlau. Les schistes de Steige se sont donc formés entre – 500 Ma (âge des schistes de Villé) et – 335 Ma (âge de la granodiorite du Hohwald).
à noter
Au nord, la carte géologique indique que les cornéennes sont à la fois associées au granite d’Andlau et à la granodiorite du Hohwald. Cela suggère que les deux plutons ont le même âge ou un âge voisin.
Une autre roche magmatique, mais volcanique, la rhyolite, affleure dans le secteur du Hohwald. Elle recouvre les schistes de Steige, les schistes tachetés et les cornéennes, mais aussi le granite du Hohwald. Elle résulte donc du refroidissement en surface d’une lave, postérieurement à ces formations.
III. Les cornéennes et les schistes tachetés
A. Disposition relative de ces deux formations
Ces roches forment une couronne autour du massif granitique d’Andlau et du massif du Hohwald. Les cornéennes forment la couronne la plus proche des granites, les schistes tachetés une couronne plus éloignée des granites et arrivant au contact des schistes de Steige. Cette disposition en couronne autour des massifs granitiques indique que ceux-ci ont contribué à leur formation. Étant des roches métamorphiques, cornéennes et schistes tachetés proviennent de la transformation à l’état solide de roches préexistantes.
B. Origine de ces roches métamorphiques (doc. 2 et 3)
Le document 2 indique que les cornéennes et les schistes tachetés ont la même composition chimique que les schistes de Steige. Outre leur disposition, cela indique que cornéennes et schistes tachetés proviennent de la transformation métamorphique des schistes de Steige. Cette transformation se traduit par la formation de nouveaux minéraux : biotite, cordiérite et andalousite pour les schistes tachetés, biotite et sillimanite pour les cornéennes. Ces nouveaux minéraux se sont formés à partir des minéraux présents dans les schistes de Steige, argiles notamment, qui ne sont plus présents chez les schistes tachetés et cornéennes.
Le document 3 fournit des informations sur le domaine de stabilité des minéraux disparus et des minéraux formés à la suite des réactions métamorphiques. Les argiles ne sont plus stables à des températures supérieures à 200 °C alors qu’andalousite, cordiérite et sillimanite sont stables à des températures nettement plus élevées. Cela signifie que cornéennes et schistes tachetés proviennent du métamorphisme des schistes de Steige, à la suite d’une forte augmentation de leur température.
C. Histoire de la formation de ces roches métamorphiques
Le secret de fabrication
Les documents 2 et 3 n’ont pas été analysés pour eux-mêmes, mais comme source d’informations pour expliquer l’origine des roches.
Le métamorphisme des schistes de Steige est consécutif à une forte augmentation de température, provoquée par la formation des plutons granitiques d’Andlau et du Hohwald. Comme l’indique le solidus du granite (doc. 3), le magma granitique, quand il commence sa cristallisation, est à une température supérieure à 800 °C à faible profondeur. La chaleur du magma diffuse dans la roche encaissante, à savoir les schistes de Steige. L’augmentation de température est la plus forte à proximité du pluton granitique, ce qui explique un métamorphisme plus intense des cornéennes que des schistes tachetés (révélé par la présence de la sillimanite uniquement dans les cornéennes). À une certaine distance du granite, l’élévation de température est trop faible pour que les réactions métamorphiques se réalisent.
Cette histoire indique que les cornéennes et les schistes tachetés sont des roches dont la formation est plus récente que celle des schistes de Steige, et contemporaine de la mise en place des plutons granitiques.
IV. Failles et roches sédimentaires les plus récentes
Les roches sédimentaires d’Andlau recouvrent les schistes de Villé, le chevauchement, les cornéennes et le granite. Leur formation est donc postérieure à celle de toutes ces roches ainsi qu’au chevauchement. Un autre argument est la présence de galets de granite d’Andlau au sein de certaines de ces roches sédimentaires. Conformément au principe d’inclusion, les galets sont plus anciens que les roches qui les contiennent.
La faille normale, correspondant à un mouvement extensif, qui recoupe le granite d’Andlau est postérieure à la formation de ce granite. En revanche, elle est recouverte à certains endroits par les roches sédimentaires, ce qui indique qu’elle est antérieure à ces roches.
Conclusion
La région d’Andlau a vu se succéder de nombreux événements géologiques qui sont à l’origine de la grande diversité des roches de cette région.
D’abord deux épisodes sédimentaires, marqués par la formation des schistes de Villé, formation géologique la plus âgée, puis par celle des schistes de Steige. Le chevauchement des schistes de Steige par les schistes de Villé indique que la région a ensuite été affectée par une orogenèse.
Suivent des épisodes magmatiques, marqués par la formation des granites d’Andlau et du Hohwald, dont l’âge est compris entre – 300 Ma et – 335 Ma et qui métamorphisent les schistes de Steige (métamorphisme de contact), ce qui génère de nouvelles roches, les cornéennes et les schistes tachetés. Un volcanisme suit, à l’origine de la rhyolite.
Des déformations tectoniques dont la faille normale est la plus notable indiquent ensuite une tectonique en extension avec formation d’un bassin sédimentaire où s’accumulent des roches sédimentaires détritiques, avec pour certaines des galets provenant de l’érosion du granite d’Andlau.
La diversité de roches résultant de l’histoire géologique de la région engendre une variété de sols propice à l’installation de cépages variés.