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Histoire
Les remises en cause des années 1970 à 1991
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Les remises en cause des années 1970 à 1991
L'émancipation des Françaises dans les années 1960 et 1970
analyse de documents
Intérêt du sujet • L'année 1968 est un marqueur fort des émancipations dont les Françaises profitent. Entre 1965 et 1975, des lois leur accordent l'autonomie financière et des droits spécifiques.
En vous appuyant sur les documents, montrez comment les Françaises s'émancipent dans les années 1960-1970.
Document 1Un témoignage sur la loi du 13 juillet 1965
Le texte [de la loi du 13 juillet 1965] consacre donc l'autonomie financière des femmes mariées, qui peuvent dès lors exercer une profession sans l'accord de leur mari, ouvrir un compte bancaire en leur nom propre et disposer de leurs biens. « Je m'en souviens très bien », explique celle qui deviendra une militante de tous les combats féministes, notamment au sein du Mouvement de libération de l'avortement et de la contraception (MLAC) […] Peu de temps après l'annonce, Thérèse Clerc s'empresse d'ouvrir un compte sur lequel seront versées les allocations familiales, jusque-là virées sur le compte de son mari. « Dès que j'ai eu mon propre chéquier, j'ai envoyé un beau courrier aux services des allocations, en disant que j'avais besoin de cet argent pour “nipper1” mes enfants et en citant la nouvelle loi. J'ai pensé qu'il y aurait des enquêtes et de la paperasse, mais le mois suivant, je les ai bien reçues. Mon mari, tout étonné de ne pas les voir tomber, m'a interrogée et je lui ai annoncé que je les avais fait virer sur mon compte. Ça a été l'une des disputes les plus homériques de toute notre histoire ! » s'amuse celle qui a divorcé en 1969 et fondé, plus tard, la maison de retraite pour femmes des Babayagas.
Pauline Verduzier, Le Figaro Madame, 13 juillet 20152.
1. « nipper » : habiller. 2. date du 50e anniversaire de la loi du 13 juillet 1965.
Document 2Le procès de Bobigny, 1972
ph © Michel Artault / Apis / Sygma / Sygma via Getty Images
Gisèle Halimi, lors du procès de Bobigny ou « procès Marie-Claire1 » de 1972.
1. « Marie-Claire », nom de la jeune femme poursuivie pour délit d'avortement et défendue par maître Halimi, son avocate.
Les clés du sujet
Comprendre la consigne
La consigne invite à tirer des documents des éléments d'émancipation des Françaises pendant les années 1960-1970. Derrière le mot « Françaises », il faut entendre les conditions de vie des femmes, leur statut, leurs droits. Le terme « émancipation » oriente le sujet vers leur libération ; cette approche n'exclut pas d'évaluer les limites de celle-ci.
Les documents mettent l'accent sur les conditions socio-économiques d'une part (« l'autonomie financière », doc. 1) et les questions de mœurs (le droit à l'IVG, doc. 2) d'autre part. À travers la personne de maître Halimi, l'entrée des femmes dans le monde professionnel qualifié peut aussi être évoquée.
Présenter le document
Organiser sa réponse
Les documents proposent une approche thématique autour de lois emblématiques qui peuvent servir de fil conducteur. À l'intérieur de chaque partie, utilisez les documents pour en extraire des libertés nouvelles que vous expliquerez ensuite. Vous pouvez croiser les documents dans chaque thème, les références au MLAC du doc. 1, par exemple, pour compléter le doc. 2.
Les titres et les indications entre crochets ne doivent pas figurer sur la copie.
Introduction
[Contexte] Les Trente Glorieuses profitent aux femmes. Dans les années 1960-1970, des réformes importantes changent leur vie. [Problématique] Comment les Françaises s'émancipent-elles ? [Présentation des documents et annonce du plan] À partir d'un article de 2015 témoignant des bouleversements produits par la loi de juillet 1965 et d'une photographie de 1972 prise lors du procès de Bobigny pour pratique illégale de l'avortement, nous évaluerons les libertés créées par l'autonomie financière des femmes [I] puis les changements produits par l'évolution des mœurs [II].
I. L'émancipation financière des femmes
1. La loi de juillet 1965
La loi du 13 juillet 1965 autorise les Françaises à travailler et à prendre le contrôle de leurs revenus (« exercer une profession sans autorisation du mari », « ouvrir un compte en banque »).
Le conseil de méthode
En présence de deux documents, efforcez-vous de croiser les informations qu'ils proposent même s'ils ne portent pas sur le même thème. Ainsi, le doc. 2 évoque la future loi Veil à laquelle le doc. 1 fait allusion ; de même, l'autonomie financière évoquée par le doc. 1 peut être illustrée par la personnalité de Gisèle Halimi (doc. 2), avocate de renom. Le contexte peut aussi être utilisé : ici, le mouvement de mai 1968 sert de toile de fond.
Les femmes ne sont donc plus assignées d'office à leur rôle d'épouse et de mère. Elles peuvent exercer un métier par choix personnel (cas de Gisèle Halimi, doc. 2) et pas seulement par nécessité.
2. La maîtrise des dépenses
L'autonomie financière redistribue le budget des dépenses (ici l'habillement des enfants) au gré de la femme.
La gestion du salaire et du patrimoine donne aux femmes la liberté d'une consommation choisie. Un marché spécifique peut se développer.
3. La remise en cause du pouvoir masculin
Le mari entre dans une « colère homérique » (doc. 1) car la loi lui fait perdre le pouvoir qu'il avait sur sa femme.
Plus indépendantes et instruites, les femmes investissent le monde du travail (un tiers des actifs), surtout dans le secteur tertiaire. Gisèle Halimi (doc. 2) ou Anne Chopinet représentent ces femmes « modernes », exerçant un métier de prestige.
à noter
Anne Chopinet est l'une des sept premières femmes à intégrer l'École polytechnique en 1972. Major du concours, elle défile sur les Champs-Élysées à la tête de sa promotion le 14 juillet 1973.
[Transition] Grâce à leur autonomie financière, les femmes peuvent se construire un avenir personnel. Qu'en est-il dans le domaine des mœurs ?
II. La libéralisation des mœurs
1. L'organisation de la lutte
Dans la continuité du mouvement de mai 1968, des mouvements féministes comme le MLF ou le MLAC (doc. 1) portent la voix des femmes.
mot clé
Le Mouvement de libération des femmes est né au début des années 1970. Ses premiers combats portent sur la contraception, le droit à l'avortement et la reconnaissance de l'homosexualité.
En 1972, le procès de Bobigny pour pratique illégale de l'avortement sert de plateforme pour populariser les revendications féministes.
2. La loi Veil
Le débat pour la légalisation de l'interruption volontaire de grossesse (IVG) débouche en 1975 sur la loi Veil qui dépénalise l'avortement.
Pour 5 ans, à titre expérimental, la loi autorise l'IVG avant la 10e semaine et après un temps de réflexion. Les femmes prennent le contrôle de leur corps.
3. D'autres libertés
En 1967, la loi Neuwirth autorise l'usage des contraceptifs, y compris la contraception orale (pilule). Les femmes peuvent désormais choisir quand devenir mères.
En 1970, la notion d'autorité parentale conjointe supprime celle de « chef de famille ». L'égalité entre mari et femme s'installe dans le couple. La loi de 1975 sur le divorce par consentement mutuel facilite les séparations.
Conclusion
[Réponse à la problématique] Les années 1960-1970 font progresser la condition des femmes en France. De grandes avancées sont acquises. [Ouverture] Mais est-ce suffisant pour les mettre à l'égal des hommes ?