Question de spécialité • Sciences sociales et politiques
SUJET COMPLET
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sesT_1706_07_04C
France métropolitaine • Juin 2017
sciences sociales et politiques • 20 points
La parité en politique
▶ Pourquoi la parité entre femmes et hommes est-elle si difficile à atteindre ? (Sujet A)
document 1 Part des femmes parmi les élus des principales assemblées politiques
En % | Avant les lois de parité1 | Après les lois de parité |
---|---|---|
Assemblée nationale | 18,5 % (2007) | 26,9 % (2012) |
Sénat | 22,1 % (2011) | 22,3 % (2014) |
Conseils régionaux Présidence Conseiller(e)s | 7,7 % (2010) 48 % (2010) | 17,6 % (2015) 47,8 % (2015) |
Conseils départementaux Présidence Conseiller(e)s | 5 % (2011) 13,8 % (2011) | 9,9 % (2015) 50 % (2015) |
Conseils municipaux Maires Conseiller(e)s | 13,8 % (2008) 35 % (2008) | 16 % (2014) 40,3 % (2014) |
Source : ministère de l'Intérieur, 2015.
1. Lois de parité : lois instaurées afin de favoriser l'égale représentation politique des femmes et des hommes.
Note : les dates indiquées entre parenthèses correspondent à la dernière élection, avant ou après les lois de parité.
document 2
Les moindres marges de manœuvre, les manques ou les silences du texte de la loi sur la parité ont été exploités par la plupart des partis politiques pour préserver les positions détenues par des hommes. Les assemblées paritaires (ou presque) sont en effet aujourd'hui celles où la loi est strictement contraignante […] tandis que les autres restent des bastions1 masculins […]. Ce sont bien les stratégies d'investiture ou de placement des candidats par les partis politiques qui construisent ce champ politique […] où la présence des femmes ne semble être tolérée que dans des assemblées mineures ou faiblement valorisées […]. Aux élections législatives de 2007, les petits partis politiques […] ont respecté la parité des candidatures (ne pouvant vraisemblablement se permettre d'amputer le montant de leur financement public) […]. Les usages de la loi ont traduit […] une fixation de la féminité autour de « qualités » stéréotypées (sens du concret, écoute, dévouement…). […] Les femmes apparaissent toujours en « défaut de » (compétence, autorité…) ou en « excès de » (nerfs, émotivité…). Elles peinent de fait à habiter de manière adéquate des rôles qui ont été définis et longtemps incarnés par des hommes.
Catherine Achin, « Au-delà de la parité », Mouvements, 2012.
1. Bastion : ici domaine réservé.
Les clés du sujet
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La parité désigne l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives.
Le sujet invite à s'interroger sur la nature des obstacles à la parité malgré l'existence de lois.
Comprendre les documents
Le document 1 est un tableau qui nous permet de comparer le pourcentage de femmes élues dans les différentes assemblées lors de scrutins récents, avant et après les dernières lois sur la parité. On constate une augmentation de la part des femmes élues dans les instances citées, mais les femmes restent largement sous-représentées au Sénat et à la présidence des assemblées. La parité est en revanche parfaite parmi les conseilleurs départementaux et presque atteinte parmi les conseillers régionaux.
Le document 2 est un texte nous présentant le maintien d'obstacles politiques et culturels à la parité. Les partis politiques en freinent la réalisation, se conformant aux stéréotypes de genre, stéréotypes qui sont intériorisés par les femmes elles-mêmes.
Structurer sa réponse
Nous présenterons les différents obstacles à la réalisation de la parité : la persistance de biais liés au genre, les stratégies des partis politiques et la portée limitée des lois pour certains modes de scrutin.
Corrigé
Introduction
En 1944, les femmes ont non seulement obtenu le droit de vote mais aussi celui de s'engager dans la compétition politique pour être élues. Plus de 70 ans après, la parité, qui désigne l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et aux fonctions électives en politique, est pourtant loin d'être atteinte. Nous étudierons les différents obstacles à la réalisation de la parité malgré l'existence de lois visant à la favoriser.
Développement
Remarque
En sociologie, on privilégie l'emploi du terme « genre » à celui de « sexe », afin de mettre l'accent sur les différences socioculturelles entre les hommes et les femmes.
Nous assistons à la persistance de biais liés au genre dans la société, c'est-à-dire de préjugés sexistes reposant sur des représentations stéréotypées des rôles masculins et féminins. Les femmes seraient dépourvues des qualités requises pour exercer une fonction politique. Ces stéréotypes sont intériorisés par les femmes elles-mêmes qui vont s'estimer peu compétentes pour mener un combat politique (document 2). En outre, elles sont victimes d'une inégale répartition des tâches domestiques qui ne les incite pas à cumuler activités professionnelle et politique. Le poids de la socialisation différentielle entre les filles et les garçons explique ces comportements.
Les partis politiques tendent à se conformer aux stéréotypes de genre (document 2). Ils contournent parfois les lois sur la parité en plaçant les candidates femmes dans des circonscriptions perdues d'avance pour préserver le personnel politique masculin déjà en place. Certains partis préfèrent même être sanctionnés financièrement. De plus, les femmes qui réussissent à avoir un mandat électoral occupent le plus souvent des postes politiques moins « prestigieux » (document 2). Elles sont ainsi sous-représentées au Sénat et à la présidence d'assemblées politiques (document 1).
Info
Le mode de scrutin binominal, qui se substitue au mode de scrutin uninominal majoritaire, oblige les partis à présenter un binôme homme-femme aux élections départementales. Il a été créé en 2013 dans le cadre des dernières lois sur la parité.
Certains modes de scrutin défavorisent la parité. Dans les scrutins uninominaux majoritaires, la loi est moins contraignante que pour les scrutins de liste où la stricte alternance hommes-femmes doit être respectée. En conséquence, la parité est presque atteinte dans les conseils régionaux avec 47,8 % de femmes élues et parfaite dans les conseils départementaux grâce au mode de scrutin binominal. La part des femmes a ainsi plus que doublé entre le scrutin de 2011 et celui de 2015. À l'inverse, l'Assemblée nationale ne comptait que 26,9 % de femmes députées en 2012. Les femmes sont également sous-représentées à la présidence des assemblées (document 2).
Conclusion
Des obstacles de nature culturelle et politique tendent à s'autoentretenir, limitant ainsi la portée des lois sur la parité.