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La souffrance des déportés au camp d'Auschwitz-Birkenau

France métropolitaine • Juillet 2024

La souffrance des déportés au camp d’Auschwitz-Birkenau

analyser des documents

45 min

20 points

Intérêt du sujet • La Seconde Guerre mondiale a été marquée par des violences inédites et des crimes contre l’humanité. Directement ou indirectement, bourreaux et survivants témoignent de l’horreur.

 

Document 1Témoignage d’une rescapée
du camp d’Auschwitz-Birkenau en Pologne

Ginette Kolinka est née en 1925 dans une famille juive. Le 13 mars 1944, la Gestapo1 l’arrête en France ainsi que son père, son petit frère de 12 ans et son neveu. Elle est déportée à Auschwitz-Birkenau. Elle est la seule de sa famille à revenir vivante de déportation.

Le soir, pour rejoindre nos baraques, nous défilons devant une rangée d’officiers, la tête tournée vers eux mais les yeux baissés. C’est la partie dangereuse. Ils sont à droite et, sur la gauche, se tient ­l’orchestre de femmes qui joue des airs entraînants pour le départ et le retour du travail. La musique militaire nous force à garder la cadence, même épuisées, à rester impeccablement alignées. Si l’une d’entre nous défaille ou sort du rang, du rythme, elle est frappée. Le passage en revue terminé, nous pouvons à nouveau nous traîner jusqu’aux baraques pour l’appel du soir, le pire de la journée. Il faut compter tout le monde, c’est-à-dire l’ensemble de Birkenau et pas seulement notre baraque. Combien sommes-nous ? 10 000 ? 15 000 ? Il faut recommencer, encore et encore. Des heures au garde-à-vous, gelées, tremblantes, épuisées. Je voudrais m’asseoir, m’écrouler, dormir, mais non : il faut rester debout et se tenir droite. Parfois, il y en a une qui tombe de fatigue ou de fièvre, son corps lourd comme un tronc manque de nous assommer. Vite se relever.

Dès que la kapo2 est passée, je glisse mes mains sous les aisselles de la fille devant moi, pour me réchauffer.

Est-ce que le compte est bon ? Est-ce qu’ils se lassent ? On ne saura jamais.

Prenez un pain de mie, coupez-le en cinq, vous obtenez une tranche de pain de quelques centimètres d’épaisseur par personne. Ajoutez une petite plaque de margarine. C’est le repas du soir, de tous les jours, de tout le monde. Pour certaines, les très malades, les presque mortes, c’est le maximum qu’elles peuvent avaler. Pour d’autres, c’est le minimum vital.

Source : Ginette Kolinka, Retour à Birkenau, Grasset, 2020, p. 32-33.

1. Gestapo : police politique nazie.

2. Kapo : personne déportée choisie pour faire régner l’ordre dans le camp.

Document 2Sélection des déportés par les SS1
à l’arrivée au camp d’Auschwitz-Birkenau

Photographie prise par des SS en mai-juin 1944 au moment de l’arrivée des Juifs de Hongrie au camp d’Auschwitz-Birkenau.

Coll. United States Holocaust Memorial Museum, courtesy of Yad Vashem (Public Domain)

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Source : T. Bruttmann, S. Hördler, C. Kreutmüller, Un album d’Auschwitz. Comment les nazis ont photographié leurs crimes, Paris, Seuil, 2023, 304 p.

1. SS : organisation nazie, ici chargée de la police à l’intérieur des camps et des centres de mise à mort.

Document 1

▶ 1. Identifiez la nature et l’auteur de ce document.

 2. Relevez trois passages du texte qui montrent différentes formes de violence que subissent les déportées.

 3. Précisez à qui est confiée la surveillance des déportées dans le camp.

Document 2

 4. Décrivez, à partir de la photographie, le processus de sélection des déportés à leur arrivée au camp.

Documents 1 et 2

 5. Expliquez, à partir de l’exemple du camp d’Auschwitz-Birkenau, que les Juifs sont victimes d’un génocide.

 

Les clés du sujet

Comprendre le document

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Répondre aux questions

 1. Appuie-toi sur la notion de témoignage. Comment s’expose-t-il ? Prends en compte l’année de publication (2020). Que signifie le titre Retour à Birkenau ?

 2. Relève les mots qui évoquent la fatigue, l’épuisement et la fragilité des détenues. De quoi souffrent-elles ? Comment les gardiens traitent les défaillantes ?

 3. Qui assure la « police intérieure » du camp ? Qu’est qu’une kapo ? Fait-elle partie de la SS ?

 4. Comment sont répartis les déportés ? Où sont les enfants ?

 5. Rappelle la définition du mot « génocide ». Choisis dans le récit de Ginette Kolinka des situations qui témoignent d’une volonté de tuer. Utilise-les pour illustrer ton propos.

▶ 1. Ce document est un témoignage rédigé par Ginette Kolinka, sur ce qu’elle a vécu à Auschwitz en 1944. Cette jeune fille juive avait 19 ans et y a perdu toute sa famille.

 2. La violence est d’abord psychologique : les déportées passent devant leurs bourreaux « les yeux baissés ». Elles sont humiliées.

Elles sont contraintes à des « cadences » épuisantes, des « rythmes » qu’elles ne peuvent pas suivre.

La répétition des comptages les soumet au froid (elles sont « gelées » ; Ginette réchauffe ses mains en les glissant « sous les aisselles de la fille » devant elle).

Elles souffrent de la faim (dernier paragraphe).

Les plus défaillantes sont « frappées ». Les « malades » ne sont pas soignées.

 3. La police intérieure du camp est à la charge de la SS. On voit leurs membres en uniforme sur la photographie. Mais la surveillance au quotidien est confiée aux kapos. Ceux-ci sont des déportés de droit commun choisis par les SS.

info +

Les kapos étaient choisis parmi des prisonniers de droit commun, des délinquants qui n’étaient pas des cibles du génocide.

 4. À leur arrivée, les déportés étaient mis en rang et alignés selon le sexe, l’âge ou la validité. Les femmes, les vieillards et les enfants, voués à l’extermination immédiate, étaient placés d’un côté. De l’autre étaient regroupés les hommes (à partir de 16 ans) et certaines jeunes femmes considérées comme aptes à travailler.

 5. Un génocide est un crime consistant à éliminer intentionnellement une population en raison de son appartenance nationale, ethnique ou religieuse. À cette fin, elle est assassinée ou maltraitée physiquement comme mentalement. À Auschwitz, les documents montrent que les déportés juifs, parce qu’ils sont juifs, étaient sélectionnés pour être exterminés dans les chambres à gaz ou soumis aux travaux forcés jusqu’à l’épuisement. Aux humiliations et aux violences physiques s’ajoutaient les privations de nourriture, l’exposition aux intempéries (le gel), l’absence de soins médicaux pour les malades jusqu’à ce que mort s’ensuive. Les jeunes femmes comme Ginette Kolinka, les vieillards et les enfants, voire les nourrissons, n’étaient pas épargnés. La communauté juive était vouée à la destruction.

info +

90 % des 1,1 million de victimes d’Auschwitz-Birkenau étaient juives, sans distinction d’âge ou de sexe.

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