Annale corrigée Dissertation

Les défis de la croissance économique

Polynésie française, mars 2023

dissertation

Les défis de la croissance économique

4 heures

20 points

Intérêt du sujet • Le plus souvent, l’analyse des limites de la croissance économique se réduit à l’étude de ses effets sur l’environnement. Or, la croissance connaît d’autres limites que ce sujet invite à approfondir.

 

Les limites écologiques sont-elles le seul défi posé par la croissance économique ?

Document 1Les émissions de gaz à effet de serre dues aux transports

Les émissions de gaz à effet de serre dues aux transports ont été multipliées par 2,5 entre 1970 et 2010, faisant passer leur part dans les émissions globales de 18 % à 21 %. Cette augmentation provient essentiellement d’une explosion des déplacements motorisés de personnes et de marchandises, multipliés par trois sur la période, principalement en Asie en lien avec l’élévation du niveau de vie. Les émissions dues aux transports par route ayant crû plus fortement que celles des autres modes, leur part est passée en 40 ans de 60 % à 72 %. Leur croissance n’est approchée que par celle des émissions des transports aériens internationaux (+180 %). Si ces émissions restent ­environ 10 fois plus faibles que celles des transports routiers, les enjeux n’en sont pas moindres. Car le transport aérien présente, avec le fret routier, l’intensité émissive1, obtenue en rapportant les émissions à la tonne (ou au passager) transportée et au kilomètre parcouru, la plus élevée, de l’ordre de 1 kg/t/km pour les longs courriers. À l’opposé, le transport maritime, qui assure 80 % des échanges internationaux de marchandises, a une intensité faible, du même ordre que le fret ferroviaire (environ 50 g/t/km). Les émissions du rail sont d’ailleurs les seules qui aient diminué, alors même que l’activité a augmenté, grâce à l’électrification et à l’abandon du charbon.

Source : Cecilia Bellora, « Émissions de gaz à effet de serre dues aux transports », dans Jézabel Coupey-Soubeyran, Carnets graphiques. L’économie mondiale dévoile ses courbes, CEPII, avril 2018.

1. Le niveau d’émissions par tonne et par kilomètre.

Document 2L’élévation de la température dans le monde (en degrés Celsius) par rapport à la température moyenne observée entre 1851 et 1900

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Source : d’après « Environnement : 2021, nouvelle année folle pour le climat », Les Échos, 10 janvier 2022.

Lecture : en 1970, la température moyenne dans le monde était supérieure de 0,3 degré par rapport à la moyenne observée entre 1851 et 1900.

Document 3Part des emplois (en %) fortement menacés par l’automatisation1

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Source : www.brief.eco, 26 septembre 2018.

1. Processus qui remplace le travail humain par des machines.

2. Organisation de coopération et de développement économiques.

Document 4Salaire horaire moyen par âge pour les travailleurs peu qualifiés des entreprises innovantes1 et non innovantes au Royaume-Uni en 2004-2016

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Source : d’après Philippe Aghion, Antonin Bergeaud, Richard Blundell et Rachel Griffith, « Comment l’innovation affecte le salaire des travailleurs peu qualifiés ? », Bloc-notes Éco, n° 130, Banque de France, 5 septembre 2019.

1. Entreprise ayant des dépenses en recherche et développement.

2. Exprimé en livres sterling (monnaie officielle du Royaume-Uni).

 

Les clés du sujet

Analyser la consigne et dégager une problématique

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Problématique. La croissance économique connaît des limites qui ne se réduisent pas au problème de la croissance soutenable.

Exploiter les documents

Document 1. Le texte porte sur les émissions de gaz à effet de serre dues aux transports. Quels sont ceux qui en émettent le plus ? Quelle relation entretient la croissance avec ces émissions ?

Document 2. Le graphique représente la hausse des températures de 1970 à 2020. Dans quelle mesure cette hausse est liée à la croissance ? Quelles en sont les conséquences ?

Document 3. Le graphique permet de comparer la part des emplois menacés par l’automatisation de différents pays de l’OCDE. Quel rapport existe-t-il entre l’automatisation et la croissance ?

Document 4. Grâce aux deux courbes, on peut observer les inégalités de revenus au Royaume-Uni. Comment évoluent-elles ? Quelle relation y a-t-il avec la croissance économique ?

Définir le plan

Tableau de 2 lignes, 2 colonnes ;Corps du tableau de 2 lignes ;Ligne 1 : I. Les conséquences écologiques de la croissance; Quels sont les effets de la croissance économique sur le capital naturel (documents 1 et 2) ?La croissance économique peut-elle être soutenable ?; Ligne 2 : II. Les conséquences sociales de la croissance; En quoi la croissance économique influence-t-elle l’emploi (document 3) ?Quels sont les liens entre croissance économique et inégalités (document 4) ?;

Les titres des parties ne doivent pas figurer sur votre copie.

Introduction

[accroche] En 1972, le rapport Meadows intitulé « Halte à la croissance ? » montre les limites de la croissance économique, notamment sur le plan écologique. [présentation du sujet] Entendue comme l’augmentation soutenue et durable des richesses créées mesurée par la variation du produit intérieur brut réel, la croissance économique a des effets négatifs sur l’environnement, rendant difficile une croissance soutenable. Mais celle-ci ne semble pas être le seul défi à relever. [problématique] Si la croissance économique a des limites, celles-ci ne sont pas seulement écologiques, mais également sociales. [annonce du plan] Pour répondre à cette problématique, nous analyserons dans un premier temps les limites écologiques de la croissance économique, puis ses limites sociales.

mot clé

La croissance est dite « soutenable » lorsqu’elle permet de satisfaire les besoins des générations présentes, sans compromettre la capacité des générations futures à satisfaire les leurs.

I. Les limites écologiques de la croissance économique

Le secret de fabrication

Dans cette partie, il faut commencer par analyser les effets de la croissance sur l’environnement avec la notion d’externalités négatives, afin de montrer que la croissance n’est pas soutenable.

1. La croissance économique est à l’origine d’externalités négatives…

La croissance économique repose en partie sur le développement de l’activité industrielle et des échanges marchands au niveau international. Or, ces activités sont à l’origine d’externalités négatives. Elles produisent des gaz à effet de serre dus, d’une part à l’utilisation d’énergies fossiles comme le charbon et le pétrole, et d’autre part au développement des moyens de transport. Ainsi, le transport par route joue un rôle important dans ces émissions (document 1).

mot clé

Les externalités négatives sont les effets de l’action d’un agent économique qui réduisent le bien-être d’autres agents, sans être pris en compte par le marché.

Les émissions de gaz à effet de serre provoquent une pollution à l’origine du réchauffement climatique. Aujourd’hui, la température moyenne dans le monde est supérieure de plus de 1 degré Celsius à la température moyenne de la période 1851-1900 (document 2).

2. … limitant les possibilités d’une croissance soutenable

L’activité économique entraîne une surexploitation des ressources naturelles, comme les ressources halieutiques ou les ressources énergétiques non renouvelables. La croissance remet en cause la biodiversité. La déforestation, l’utilisation de produits phytosanitaires sont responsables de la quasi-disparition d’espèces animales et végétales, réduisant le capital naturel.

L’appauvrissement du capital naturel rend plus difficile une croissance soutenable, c’est-à-dire qui satisfait les besoins immédiats sans compromettre ceux des générations futures. Or, pour être soutenable, la croissance nécessite la transmission d’un stock de capitaux physique, humain, institutionnel et naturel. Le progrès technique pourrait compenser la perte de capital naturel, mais il peut aggraver les inégalités économiques et sociales.

II. La croissance économique, facteur d’inégalités

Le secret de fabrication

Il est plus logique de commencer cette partie en évoquant les effets de la croissance sur l’emploi car ceux-ci engendrent des inégalités de revenus.

1. Les évolutions de l’emploi liées à la croissance

Le progrès technique est le principal facteur de la croissance économique car il permet d’accroître la productivité des facteurs de production. Il recouvre l’ensemble des innovations de produits et de ­procédés.

à noter

On peut mesurer le progrès technique par l’augmentation de la productivité globale des facteurs (PGF).

Le progrès technique a des effets sur l’emploi. Il peut en créer grâce au développement de nouveaux produits. Mais il peut également en détruire car les innovations de procédés accroissent la productivité du travail et permettent donc de produire plus avec moins de travail. Par exemple, l’automatisation du processus de production menace 14 % des emplois dans les pays de l’OCDE (document 3), entraînant des inégalités entre ceux qui ont un emploi et ceux qui l’ont perdu.

2. Croissance et inégalités de revenus

Si le nombre d’emplois dépend de la nature des innovations, celles-ci vont avoir des conséquences sur le niveau de qualification. Les entreprises innovantes créent des emplois, mais ce sont généralement des emplois plus qualifiés. Les emplois détruits sont, quant à eux, le plus souvent des emplois non qualifiés.

Les inégalités entre les salaires dans les entreprises innovantes et dans les entreprises non innovantes vont s’accentuer car les premières créent des emplois plus qualifiés, offrant donc des salaires plus élevés. Ces inégalités concernent également les emplois non qualifiés suivant l’âge : au Royaume-Uni, les écarts de salaires sont les plus faibles à 22 ans et les plus élevés à 46 ans (document 4).

Conclusion

[bilan] Aujourd’hui, l’objectif de la croissance économique se trouve confronté à ses limites écologiques. En effet, la croissance se traduit par une exploitation des ressources naturelles, une augmentation de la pollution favorisant le réchauffement climatique et un appauvrissement de la biodiversité. Si la croissance économique est de moins en moins soutenable, elle connaît un autre défi, celui des inégalités relatives à l’emploi et aux salaires. Ces inégalités résultent la plupart du temps du progrès technique, moteur indispensable de la croissance économique. [ouverture] Face à ces défis, il reste à trouver les solutions envisageables pour maintenir une croissance soutenable qui n’aggrave pas les inégalités sociales.

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