Les espaces maritimes : enjeux économiques et stratégiques
L'Égypte a pris le taureau par les cornes, en entreprenant il y a onze mois de cela un chantier pharaonique. Des travaux en accéléré dans la compétition que se livrent Suez et le canal de Panama pour faire passer dans leurs eaux les géants de la mer. […] Pour l'Égypte, il s'agissait non seulement de prendre en compte le développement du trafic Asie-Europe, mais aussi donc de conserver ses parts de marché, sur les trajets Asie-côte est de l'Amérique. […]
Le trafic va s'accélérer, du fait notamment d'un temps de transit mécaniquement réduit de sept heures – passant de dix-huit à onze heures – avec les nouvelles installations. D'ici à 2023, quelque 97 navires pourront emprunter le canal quotidiennement, contre 49 actuellement, affirme l'Autorité du canal de Suez.
Le canal de Suez est un passage stratégique pour les transporteurs maritimes. Il draine près de 8 % du trafic mondial […]. Impossible pour un navire de s'affranchir de ce canal sans naviguer de nombreux jours supplémentaires. D'après l'armateur français CMA-CGM, une traversée entre Rotterdam et Singapour dure neuf jours de moins en passant par le canal de Suez qu'en naviguant au large du cap de Bonne Espérance, en Afrique du Sud.
Pour le groupe CMA-CGM, le canal de Suez s'avère « une route stratégique et incontournable du fait de sa situation géographique, à la croisée des lignes desservant les grands marchés mondiaux ». Il a ainsi une longueur d'avance sur le canal de Panama, presque deux fois moins utilisé par l'armateur français.
Néanmoins, les transporteurs pourraient déchanter en constatant une possible augmentation des tarifs de passage sur le canal de Suez. En situation de monopole sur le trajet Asie-Europe, l'Égypte pourrait être tentée de répercuter le coût des travaux sur ses tarifs.
Lisez la consigne
La consigne comporte par ailleurs une difficulté dans sa formulation : « certains espaces maritimes ». Cela renvoie à l'idée que les territoires ne sont pas de valeur égale dans la mondialisation. Vous allez donc traiter les passages stratégiques : canaux transocéaniques et détroits, en privilégiant le canal de Suez, qui est l'objet des documents.
Analysez les documents
Le document 2 est un petit dossier graphique et cartographique, assez ancien (2009), donc antérieur aux travaux mentionnés dans le document 1. Il permet de préciser les enjeux du canal et d'en dresser un bilan à date.
Définissez les axes de l'étude
Ces canaux et détroits représentent un enjeu à la fois stratégique et économique : en quoi sont-ils importants sur ces deux plans ? Pour quels acteurs ? À quelle échelle d'analyse ? Le plus simple – et le plus rapide en temps limité – est d'utiliser les deux catégories pour bâtir un plan en deux parties : les enjeux économiques puis les enjeux stratégiques.
Introduction
[Présentation des documents et problématique] L'article publié dans le quotidien Les Échos (doc. 1) fait le point sur le doublement du canal de Suez, inauguré le 6 août 2015. Le document 2, tiré du site Internet lemonde.fr, est un dossier graphique et cartographique plus ancien (2009) qui complète les informations de l'article des Échos. Ces deux documents permettent d'analyser les enjeux liés au canal de Suez et, par extension, à certains autres espaces maritimes particuliers.
[Annonce du plan] Ces espaces maritimes au cœur de la mondialisation présentent en effet des enjeux économiques majeurs, exploités par les acteurs privés. Mais leur importance dans les circuits mondialisés leur donne également une importance stratégique pour les acteurs publics.
I. Des enjeux économiques majeurs pour des espaces au cœur de la mondialisation
Le mille nautique est égal à 1,852 kilomètre.
Or, les compagnies logistiques, telles CMA-CGM, citée dans l'article des Échos, Maersk ou MSC, déploient des porte-conteneurs géants qui mesurent plus de 380 mètres de long et peuvent transporter plus de 18 000 conteneurs. Ce « gigantisme » naval (doc. 1, l. 4) a progressivement dépassé les capacités des grands canaux, rendant nécessaires les travaux récents de doublement des capacités de Suez et de Panama. Le premier compte ainsi faire passer 97 navires par jour, contre 49 auparavant (doc. 1, l. 15).
[Transition] L'enjeu économique de ces espaces maritimes particuliers est donc fondamental pour les acteurs privés. Mais ces canaux et détroits prennent également une valeur stratégique pour les acteurs publics.
II. Des enjeux géostratégiques majeurs pour des acteurs à toutes les échelles
Un rappel de l'importance stratégique du canal de Suez et de sa zone dans l'histoire récente sera très apprécié du correcteur.
Ces routes maritimes mondiales font aussi l'objet de convoitises locales. Le document 2 fait état de 111 actes de piraterie en 2008 dans le golfe d'Aden. Et il s'agit d'un phénomène endémique (canal de Panama, détroit de Malacca, etc.). Les grandes puissances interviennent contre ce fléau afin de garantir la liberté de navigation qui est l'une des conditions de la mondialisation. C'est le sens des initiatives présentées par le document 2 : opération européenne Atalante, présence de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN), mais aussi des marines russe, chinoise et japonaise.