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Peut-on être certain d'être dans le vrai ?

Dissertation

Peut-on être certain d'être dans le vrai ?

4 heures

20 points

Intérêt du sujet • Les hommes ont-ils véritablement marché sur la Lune ? La Terre est-elle vraiment ronde ? Si nous en avons des preuves, des théories conspirationnistes – aujourd'hui diffusées sur les réseaux sociaux – insistent sur l'impossibilité d'être absolument certains d'être dans le vrai.

 

 

Les clés du sujet

Définir les termes du sujet

Être certain

La certitude désigne une disposition subjective de celui qui est assuré de la validité de ce qu'il affirme.

Être dans le vrai 

La vérité est l'adéquation entre le discours et la réalité. Une affirmation est vraie si, et seulement si, elle correspond à ce qui est réellement. Cela pose la question d'un critère qui permettrait d'être sûr de posséder la vérité.

Dégager la problématique

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Construire un plan

Tableau de 2 lignes, 2 colonnes ;Corps du tableau de 2 lignes ;Ligne 1 : 1. La certitude : une disposition ambiguë; Montrez que la connaissance de la vérité implique la certitude.Intéressez-vous aux cas où la certitude n'est pas la marque du vrai : comment l'erreur et l'illusion peuvent-elles conduire à la certitude ? Trouvez des exemples.; Ligne 2 : 2. Les origines de la certitude; Distinguez la certitude immédiate, irréfléchie, de la certitude produite par un effort de pensée.Montrez que l'homme peut toujours remettre en cause ses propres certitudes, et que c'est cela qui lui assure qu'il est face à la vérité.;

Les titres en couleurs et les indications entre crochets servent à guider la lecture mais ne doivent en aucun cas figurer sur la copie.

Introduction

[Accroche] Othello est certain que Desdémone le trompe : il en a l'intime conviction, il pense en avoir la preuve. C'est ce qui le conduit au meurtre. Pourtant, sa jalousie le trompe : Desdémone lui était fidèle. [Reformulation du sujet] Que vaut donc la certitude dans notre recherche de la vérité ? [Problématique] D'un côté, nous associons vérité et certitude, dans la mesure où posséder la vérité implique des justifications qui produisent en nous de la certitude. Mais, d'un autre côté, celui qui se trompe peut tout aussi bien être certain de ce qu'il affirme. Dès lors, la certitude ne saurait être le critère suffisant de la vérité. [Annonce du plan] Nous montrerons tout d'abord l'ambiguïté de la certitude, marque du vrai aussi bien que du faux. Puis nous verrons que la certitude n'a de valeur qu'à certaines conditions, en rapport avec une démarche rigoureuse pour atteindre la vérité.

1. La certitude : une disposition ambiguë

A. Un sentiment qui ne trompe pas

La certitude est la disposition d'esprit de celui qui ne doute pas d'une proposition qu'il considère comme vraie. D'un point de vue subjectif, le fait d'être certains de ce que nous affirmons nous paraît être le critère de la vérité. La certitude est une conviction produite par des preuves qui nous semblent suffisantes, qu'il s'agisse de démonstrations rationnelles ou d'expériences.

La certitude n'est donc pas gratuite : elle implique d'avoir des raisons justifiant que l'on est assuré de la vérité de ce qu'on dit. Il ne suffit pas de dire une vérité, par hasard, pour être dans le vrai : la certitude semble résulter d'un processus de justification, si bien que « savoir, c'est savoir qu'on sait » selon les mots d'Alain.

Le secret de fabrication

Les stoïciens distinguent « dire le vrai » et « être dans le vrai » : il ne suffit pas de dire le vrai pour être dans le vrai, et un fou qui dirait une vérité ne serait pas pour autant savant. La vérité implique donc toujours une disposition subjective.

B. Un sentiment qui trompe souvent

Pourtant, la certitude peut aussi être la marque de l'erreur ou de l'illusion. Celui qui se trompe est souvent persuadé de la vérité de ce qu'il affirme. Son ignorance n'est pas simplement une absence de savoir : elle prend la forme d'une opinion ou d'un préjugé auquel le sujet adhère parfois sans réserve.

Le personnage de Don Quichotte illustre cette ambiguïté de la certitude. Certain d'être un chevalier dont la mission est de faire le bien, il ne doute pas du fait que les moulins soient des géants à combattre. La certitude de Don Quichotte est à la mesure de son désir d'être chevalier, bien que celui-ci s'oppose à la réalité.

C. Un critère de vérité insuffisant

La certitude est donc une disposition subjective qui est tantôt la marque du vrai, tantôt celle de son contraire. Or les hommes sont à la recherche d'un critère du vrai, c'est-à-dire d'un moyen de distinguer parfaitement le vrai du faux. La certitude est une conviction qui se rapporte à la subjectivité : elle est de l'ordre de l'impression, du sentiment parfois vague. Rien ne nous assure donc qu'elle soit un ­critère valable du vrai.

à noter

Un critère (même famille que le mot « critique ») permet de distinguer deux choses différentes.

Bien plus, la réflexion semble aboutir ici à un cercle vicieux. En effet, si nous faisons de la certitude un critère du vrai, qu'est-ce qui pourra nous assurer de la validité de ce critère sinon… la certitude elle-même ? La certitude pose ainsi problème dans la mesure où elle n'est pas toujours le produit d'un effort intellectuel.

[Transition] La certitude ne saurait donc être un critère du vrai. Est-ce à dire que l'homme n'a jamais aucune raison d'être assuré d'être dans le vrai ?

2. Les origines de la certitude

A. Produire la certitude

Si ce n'est pas la dimension subjective de la certitude qui permet de s'assurer d'être dans le vrai, il convient de remonter aux conditions de la certitude : qu'est-ce qui permet au sujet d'être certain de la vérité d'une proposition ? On peut dès lors distinguer deux formes de certitude : une certitude qui relève de la passivité et une certitude produite par une activité méthodique du sujet qui cherche à connaître la vérité.

Claude Bernard montre ainsi que l'expérience peut produire une certitude valable, à condition qu'elle soit menée selon une méthode rigoureuse : la méthode hypothético-déductive. Cette méthode suit trois étapes : on observe un phénomène, on formule des hypothèses explicatives, on construit un protocole expérimental qui permet de confirmer ou d'infirmer une hypothèse. La certitude obtenue ne vaut qu'en tant que produit d'une expérimentation méthodique.

B. Doute et certitude

Paradoxalement, la certitude n'a de valeur qu'à la condition d'être rapportée à un effort de doute permanent. Pour Claude Bernard, l'expérimentateur ne doit pas se lasser d'éprouver la validité de son hypothèse pour que la certitude obtenue soit « l'expression du doute philosophique porté aussi loin que possible ».

On retrouve cette idée dans l'œuvre de Descartes. Le cogito est la première vérité indubitable sur laquelle repose l'ensemble des connaissances que l'esprit peut acquérir. « Je pense donc je suis » est donc une proposition certaine. Mais cette certitude est le produit du doute. Malgré tout l'effort de l'esprit pour douter de tout, seule résiste au doute l'intuition de l'existence de la conscience.

à noter

Descartes s'appuie sur trois arguments pour essayer de douter de tout : nos sens nous trompent souvent ; nous ne parvenons pas à distinguer facilement rêve et éveil ; un malin génie peut exister et nous tromper, y compris quand nous nous croyons certains de quelque chose.

Ce n'est donc pas la certitude en tant que telle qui montre qu'on est dans le vrai, c'est plutôt l'effort permanent pour interroger cette certitude, la remettre en cause. Cet effort n'est pas un simple sentiment, car il renvoie à un ensemble de procédures qui permettent d'établir la validité d'une proposition. Ces procédures impliquent la discussion et le débat avec les autres, ne serait-ce que pour mettre à l'épreuve ses propres convictions.

C'est ce que montre Popper : « Aussi intense soit-il, un sentiment de conviction ne peut jamais justifier un énoncé. » Seules les procédures d'enquête et de vérification ont une valeur scientifique. Popper parle de la certitude absolue comme d'une idée limite : « Il peut toujours y avoir une certitude qui soit encore plus assurée. »

C. Des domaines propres à la certitude ?

Mais dire que la certitude n'a pas de valeur scientifique revient-il à dire qu'elle ne saurait être la marque du vrai ? Elle peut valoir sur le plan moral ou sur le plan religieux. J'agis ainsi car j'ai la conviction que c'est la bonne chose à faire ; je crois parce que je suis certain de la fécondité de telle parole.

Là encore, la certitude suppose d'être interrogée par le sujet qui l'éprouve pour ne pas devenir une forme de fanatisme. Si « l'étonnement est essentiel à la condition d'homme », comme le montre Jeanne Hersch, c'est que l'homme doit toujours remettre en cause ce qui lui paraît évident.

Conclusion

On n'est jamais absolument certain d'être dans le vrai. C'est l'effort pour interroger nos certitudes qui leur confère de la valeur. En ce sens, douter de ce qu'on croit établi avec certitude n'est pas contradictoire avec la recherche de la vérité.

Othello a ainsi manqué de prudence, prenant sa propre certitude pour argent comptant. Une expérience subjective, aussi forte soit-elle, ne saurait valoir comme critère de la vérité. On comprend dès lors pourquoi Platon, dans l'allégorie de la caverne, présente la recherche de la vérité comme une forme de libération de soi et d'arrachement à ce qui nous paraît le plus évident.

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