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France métropolitaine, juin 2024 • Jour 1
SPRINT FINAL
28
France métropolitaine, juin 2024 • Jour 1
exercice 2
Stress et transit intestinal
Intérêt du sujet • Ce sujet est centré sur la coopération et l’intégration de la communication nerveuse et de la communication hormonale dans une réaction de stress aigu.
Un stress aigu est souvent associé à des troubles intestinaux, notamment une accélération du transit intestinal, c’est-à-dire que les produits issus de l’alimentation progressent plus rapidement qu’en situation normale dans l’intestin grêle puis dans le gros intestin.
Proposer une explication au fait que le stress aigu accélère le transit intestinal chez les rongeurs.
Vous organiserez votre réponse selon une démarche de votre choix intégrant des données des documents et les connaissances utiles.
Document 1Mesure de la concentration sanguine de corticostérone
Afin de les exposer à une situation de stress, des souris ont été soumises au stress de l’évitement de l’eau, c’est-à-dire qu’elles ont été placées sur une plate-forme surélevée à 1 cm au-dessus du niveau de l’eau, au centre d’un réservoir en plastique, pendant 1 h, 4 jours de suite.
Les concentrations sanguines en corticostérone de ces souris ainsi que celles de souris non soumises à ce stress ont été mesurées. La corticostérone est un équivalent du cortisol chez l’être humain. Chaque point du graphique correspond à la mesure réalisée chez une souris.
Control : souris non soumises au stress de l’évitement de l’eau
WAS (Water Avoidance Stress) : souris soumises au stress de l’évitement de l’eau
**** : significativement différent
D’après Blin et al., Psychological stress induces an increase in cholinergic enteric neuromuscular pathways mediated by glucocorticoid receptors, 2023
Document 2Étude des neurones du plexus myentérique, impliqués dans le transit intestinal
A. Localisation du plexus myentérique dans l’intestin
Coupe transversale de l’intestin
D’après T. Lebouvier, Système nerveux entérique et maladie de Parkinson, thèse pour le diplôme d’État de docteur en Médecine, université de Nantes, 2008
Les produits issus de l’alimentation, après être passés par la bouche, l’œsophage et l’estomac, progressent dans la lumière de l’intestin grêle puis du gros intestin. Leur avancée, que l’on appelle transit intestinal, est permise par des cycles de contraction-relâchement des muscles circulaires et longitudinaux lisses situés dans la paroi des intestins. Les plexus myentériques et sous-muqueux sont constitués de neurones regroupés en ganglions.
B. Mesure de l’activité des neurones du plexus myentérique
Des fragments de gros intestin provenant de rats soumis au même protocole que les souris du document 1 ont été récupérés puis marqués par immunohistochimie afin de mettre en évidence la présence de la protéine Fos, qui est un marqueur de l’activité des neurones. La protéine Fos apparaît en gris clair sur les photographies. Les expériences ont été réalisées sur le début du gros intestin (= partie proximale) et sur la fin du gros intestin (= partie distale).
Photographies au microscope de ganglions du plexus myentérique de la partie proximale (a et b) et de la partie distale (c et d) du gros intestin de rats
ph © Miampamba et al., Water avoidance stress activates colonic myenteric neurons in female rats, 2007
Groupe témoin
WAS
Groupe témoin : rats non soumis au stress de l’évitement de l’eau
WAS (Water Avoidance Stress) : rats soumis au stress de l’évitement de l’eau
Les résultats présentés ici sont représentatifs pour l’ensemble du gros intestin.
D’après Miampamba et al., Water avoidance stress activates colonic myenteric neurons in female rats, 2007
C. Mesure de la concentration d’acétylcholine dans le plexus myentérique
Des neurones du plexus myentérique, dans lesquels ont été mis en évidence des récepteurs à la corticostérone, produisent de l’acétylcholine. Le CORT 108297 est un antagoniste des récepteurs à la corticostérone, c’est-à-dire qu’il peut se fixer durablement sur ces récepteurs sans les activer et en empêchant la corticostérone de s’y fixer. Des mesures de la concentration d’acétylcholine dans le plexus myentérique de souris ont été réalisées dans différentes conditions.
Groupe témoin |
WAS |
WAS + CORT 108297 |
|
---|---|---|---|
Concentration d’acétylcholine dans le plexus myentérique (en μmol/μg de protéines) |
1 |
1,5* |
0,8° |
Groupe témoin : souris non soumises au stress de l’évitement de l’eau
WAS (Water Avoidance Stress) : souris soumises au stress de l’évitement de l’eau
CORT 108297 : souris à qui on a injecté du CORT 108297
* : différence significative par rapport au groupe témoin
° : différence non significative par rapport au groupe témoin
D’après Blin et al., Psychological stress induces an increase in cholinergic enteric neuromuscular pathways mediated by glucocorticoid receptors, 2023
Document 3Étude du transit intestinal dans différentes conditions
A. Mesures de la capacité des muscles de la paroi de l’intestin à se contracter
Des bandes de paroi intestinale ont été récupérées sur des souris soumises à un stress de l’évitement de l’eau. Leur force de contraction a été enregistrée en continu à l’aide de capteurs de force isométrique. À un moment donné, ces bandes ont été soumises à une stimulation électrique (EFS), ce qui active les neurones du plexus myentérique.
La réponse a été enregistrée d’une part en laissant les récepteurs à l’acétylcholine fonctionnels (à gauche) ou en les bloquant à l’aide d’un antagoniste de ces récepteurs, l’atropine (à droite). Les récepteurs à l’acétylcholine sont situés sur les cellules des muscles lisses de l’intestin.
La « hauteur » des signaux représente la force de contraction de la bande de paroi intestinale.
D’après Blin et al., Psychological stress induces an increase in cholinergic enteric neuromuscular pathways mediated by glucocorticoid receptors, 2023
B. Comptage du nombre de boulettes fécales émises
Les boulettes fécales (crottes) émises par différents lots de souris soumises au stress de l’évitement de l’eau ont été comptées avant d’être soumises au stress (D0) et après la période de stress (D4). Certaines ont au préalable subi une injection de CORT 108297. Chaque point du graphique correspond à la mesure réalisée chez une souris.
WAS (Water Avoidance Stress) : souris soumises au stress de l’évitement de l’eau
CORT 108297 : souris à qui on a injecté du CORT 108297
*** : significativement différent
D’après Blin et al., Psychological stress induces an increase in cholinergic enteric neuromuscular pathways mediated by glucocorticoid receptors, 2023
Les clés du sujet
Étape 1. Comprendre le sujet
Le stress aigu étudié chez les rongeurs se traduit par une accélération du transit intestinal engendré par une augmentation de la contraction des fibres musculaires de l’intestin.
Il s’agit d’expliquer comment un mécanisme physiologique commun à tous les stress aigus, l’activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-corticosurrénalien, contribue à augmenter la motilité intestinale.
Étape 2. Exploiter les documents
Le document 1 permet d’aboutir à la conclusion que l’activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-corticosurrénalien intervient dans le stress aigu des rongeurs.
Le document 2 révèle l’implication, sur le transit intestinal, de neurones présents dans la paroi de l’intestin, et cela sous l’action de la corticostérone.
Le document 3a aborde la façon dont les changements d’activité des neurones « intestinaux » influencent la contraction des fibres musculaires de la paroi intestinale.
Le document 3b met en évidence l’action de la corticostérone sur la motilité de l’intestin.
Étape 3. Construire la réponse
Introduction |
Posez le problème à résoudre en utilisant des données du document 3b. |
I. Activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-corticosurrénalien |
Interprétez les données du document 1 en utilisant vos connaissances sur les mécanismes physiologiques du stress aigu. |
II. Action de la corticostérone sur le transit intestinal |
Utilisez les données des documents 3b et 2c pour conclure sur l’action de la corticostérone. |
III. Action de la corticostérone sur les neurones « intestinaux » |
Démontrez qu’il y a une activation des neurones « intestinaux » au cours du stress déclenchée au moins en partie par la corticostérone. |
IV. Action des neurones « intestinaux » sur le transit intestinal |
Exploitez les données du document 3a pour établir le mécanisme d’action des neurones « intestinaux » sur la contraction des fibres musculaires intestinales. |
Conclusion |
Réalisez un schéma bilan traduisant la succession des mécanismes physiologiques agissant au cours du stress aigu des rongeurs. |
Introduction
Le document 3b indique que le nombre de crottes émises par les souris après la période de stress (D4) est statistiquement supérieur à celui des crottes produites avant que les souris ne soient soumises au stress (D0). Le nombre de crottes traduit l’intensité du transit intestinal. Ce nombre augmente lorsque l’intensité du transit s’accroît.
à noter
Une information issue d’un document peut être utilisée en introduction.
À partir des informations extraites des documents, nous allons établir comment les mécanismes physiologiques du stress aigu des rongeurs causent une accélération du transit intestinal.
I. Activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-corticosurrénalien (axe HHC)
Le conseil de méthode
Décrire en détail le fonctionnement de l’axe HHC dont l’activation est mise en évidence dans le document 1 n’est pas utile pour l’interprétation des autres documents. Il faut se limiter à l’idée essentielle : l’activation de l’axe HHC est le mécanisme physiologique initial qui aboutit à la production de corticostérone (cortisol), et que cette hormone peut être à l’origine des autres manifestations du stress.
La corticostérone, équivalent du cortisol humain, est une hormone sécrétée par les glandes corticosurrénales. Le document 1 indique que la concentration sanguine de corticostérone des souris non stressées est environ de 50 ng/ml alors que la moyenne des concentrations des souris soumises au stress de l’évitement de l’eau est d’environ de 300 ng/ml donc nettement supérieure. Une réponse de l’organisme des souris à l’agent stresseur est donc une sécrétion accrue de corticostérone par les glandes corticosurrénales.
à noter
L’importante variabilité des concentrations sanguines en corticostérone chez les souris stressées traduit l’importante variabilité des réactions physiologiques des souris face à un même agent stresseur.
L’augmentation de la concentration sanguine de corticostérone est une caractéristique commune à tous les stress aigus. Sous l’action des stimuli stresseurs, l’hypothalamus est activé et sécrète une neurohormone, CRH. Celle-ci agit sur l’hypophyse, qui répond en sécrétant une hormone, l’ACTH. Celle-ci stimule la sécrétion de la corticostérone (cortisol chez l’humain). Cette activation de l’axe hypothalamo-hypophyso-corticosurrénalien est la manifestation physiologique initiale.
Le problème à résoudre est donc de déterminer si l’augmentation de la concentration de corticostérone chez les souris stressées est à l’origine de l’accélération du transit intestinal, et si oui, comment ?
II. Action de la corticostérone sur le transit intestinal
Le document 3b fournit des données sur le nombre de crottes émises par des souris de deux lots, avant et après la période de stress. La seule différence entre les souris des deux lots est que celles d’un des lots ont reçu une injection de CORT 108297. Le document 2c indique que ce produit est un antagoniste des récepteurs à la corticostérone. Il empêche donc l’action de cette hormone. Chez les souris ayant reçu l’injection, la corticostérone produite par les corticosurrénales ne peut donc pas agir, ou très peu. La comparaison du nombre de crottes produites par les souris des deux lots permet donc d’évaluer l’action de la corticostérone sur la production de crottes et par là même sur l’intensité du transit intestinal.
Chez les souris témoins (pas d’injection de CORT 108297), le nombre de crottes après la période de stress (D4) est nettement supérieur à celui avant le stress (D0). Chez les souris de l’autre lot, d’après la légende, le nombre de crottes n’est pas significativement différent entre D0 et D4. On peut en conclure que l’augmentation de la production de crottes par les souris témoins et donc l’accélération du transit intestinal engendrées par le stress sont dues, au moins en partie, à l’action de la corticostérone. Il reste à déterminer comment celle-ci agit.
Le conseil de méthode
Établir la démarche de votre choix, comme vous y invite le sujet, signifie qu’il n’est pas obligatoire de suivre l’ordre des documents. C’est le cas de ce corrigé, où l’exploitation du dernier document intervient tôt. Explorez toujours l’ensemble des documents avant de commencer à rédiger votre réponse afin d’établir au préalable une démarche cohérente.
III. Action de la corticostérone sur les neurones « intestinaux »
Le document 2a renseigne sur une innervation propre à la paroi de l’intestin : on observe la présence de plexus composés de neurones regroupés en ganglions ; en somme ce sont de mini centres nerveux.
Pour évaluer l’activité de ces neurones, on recherche la présence d’une protéine, la protéine Fos, qui en est un marqueur. Les photographies du document 2b montrent pour le groupe témoin une seule tache sur des neurones de la partie proximale du gros intestin et aucune sur la partie distale. En revanche, on constate la présence de plusieurs taches aussi bien sur les neurones de la partie proximale que de la partie distale du gros intestin de rats soumis au stress de l’évitement de l’eau. On peut conclure qu’au cours du stress, il y a une activation des neurones du plexus myentérique (neurones intestinaux) tout au long du gros intestin.
Un autre marqueur de l’activité de ces neurones est la production d’un neuromédiateur, l’acétylcholine. Le document 2c fournit des données sur cette activité. Les neurones possèdent des récepteurs à la corticostérone, ce qui indique que cette hormone peut agir sur eux. La concentration d’acétylcholine dans le plexus myentérique augmente de 50 % chez les souris stressées par rapport au groupe témoin non stressé. Cela indique que le stress active la production d’acétylcholine par les neurones du plexus. En revanche, si on injecte un antagoniste des récepteurs à la corticostérone, donc si on inhibe l’action de la corticostérone chez les souris stressées, la concentration d’acétylcholine dans le plexus n’est pas significativement différente par rapport au groupe témoin. On peut conclure que la corticostérone a pour effet d’activer la production d’acétylcholine par les neurones du plexus myentérique.
IV. Action des neurones « intestinaux » sur le transit intestinal
Le document 2a montre la présence de deux couches de cellules musculaires, l’une formant un muscle circulaire, l’autre un muscle longitudinal, dans la paroi intestinale. Il précise aussi que ce sont les cycles de contraction-relâchement de ces muscles qui permettent l’avancée des produits issus de l’alimentation, donc le transit intestinal. Ces muscles sont des effecteurs musculaires du stress de l’évitement de l’eau.
Les neurones du plexus sont situés à proximité immédiate des fibres musculaires, ce qui laisse à penser que l’acétylcholine, neurotransmetteur produit par les neurones, pourrait provoquer la contraction des fibres musculaires intestinales. Cette hypothèse est renforcée par la présence de récepteurs à l’acétylcholine sur les cellules des muscles lisses de l’intestin. Le document 3a permet de tester cette hypothèse. La stimulation électrique des neurones du plexus myentérique pendant 10 secondes entraîne une forte contraction des bandes de la paroi intestinale. L’intensité de cette contraction est réduite de moitié environ si les récepteurs à l’acétylcholine sont bloqués par un antagoniste, l’atropine. Cela confirme que les neurones « intestinaux » stimulent la contraction des fibres musculaires de l’intestin.
Conclusion
En reprenant les conclusions partielles tirées des divers documents, on aboutit à la succession des mécanismes qui accélèrent le transit intestinal.
Mécanismes physiologiques agissant au cours du stress aigu des rongeurs