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France métropolitaine, septembre 2021 Exercice 2
Un cas clinique de perturbation physiologique et son traitement
Intérêt du sujet • Il faut utiliser ses connaissances pour exploiter les données d’un bilan médical. Cela permet de proposer un diagnostic sur l’origine des symptômes d’une patiente et d’expliquer pourquoi le traitement proposé a été efficace.
Une personne se présente à l’hôpital en raison de douleurs abdominales. Les examens médicaux pratiqués permettent de constater certains dysfonctionnements et de cerner l’origine de sa pathologie. L’équipe médicale procède alors à une intervention chirurgicale qui aboutit à la guérison de la patiente. Son état est décrit par les documents suivants.
Expliquer comment le traitement choisi par l’équipe médicale a pu supprimer les dérèglements physiologiques de la patiente.
Vous organiserez votre réponse selon une démarche de votre choix intégrant des données des documents et les connaissances utiles.
DOCUMENT 1Informations médicales sur la patiente avant traitement
Diabète sucré avec une glycémie non à jeun à 3,21 g.L–1 (valeur normale inférieure à 1,4 g.L–1).
Extrait des résultats du bilan hormonal :
Différentes analyses ont été pratiquées :
un dosage du cortisol dans les urines sur 24 heures ;
un dosage sanguin de l’hormone hypophysaire ACTH* dans le cadre d’un protocole médical particulier, après injection d’un glucocorticoïde de synthèse. Ce protocole est utilisé dans le diagnostic d’anomalie de l’hypophyse ou de sécrétion d’ACTH non hypophysaire (par exemple par une tumeur).
D’après les sites louvainmedical.be et ceed-diabete.org
* L’ACTH est une hormone hypophysaire qui stimule l’activité de la glande corticosurrénale.
DOCUMENT 2Résultat d’un scanner abdominal de la patiente avant traitement (image de gauche) et scanner abdominal d’une personne sans pathologie (image de droite)
Les différences de contraste des deux images ne sont pas significatives.
© A. Dysseleer, D. Maiter, Louvain Med 2019, 138 (1) : 30-36
1. foie
2. rein droit
3. glande surrénale
ph © DR
4. vertèbre
5. rein gauche
6. bassin (côté gauche)
D’après le site louvainmedical.be
DOCUMENT 3 Traitement chirurgical et analyses postopératoires
La patiente a bénéficié d’une ablation de la glande surrénale gauche, sans complications, qui a permis sa guérison. La taille de la masse enlevée est de 8 cm de diamètre. Son examen indique la présence d’une partie tumorale richement vascularisée.
L’équipe médicale a ensuite procédé à une analyse d’un prélèvement de la partie tumorale par immunohistochimie. Ce prélèvement est préparé, incubé avec des anticorps couplés à un marqueur, et rincé. Après révélation du marquage, le tissu est observé.
Les deux images suivantes présentent les observations microscopiques du tissu tumoral surrénalien (T) après immunohistochimie.
© A. Dysseleer, D. Maiter, Louvain Med 2019, 138 (1) : 30-36
Image de gauche : les anticorps utilisés sont des anticorps anti-chromogranine couplés à un marqueur foncé. La chromogranine est une protéine utilisée comme marqueur de cellules capables de sécréter une hormone.
Image de droite : les anticorps utilisés sont des anticorps anti-ACTH couplés à un marqueur foncé.
Une observation témoin de tissu tumoral (T) sans marquage immunohistochimique a aussi été réalisée au niveau du contact avec le tissu de la glande surrénale (S) :
© A. Dysseleer,
D. Maiter,
Louvain Med 2019, 138 (1) : 30-36
D’après le site louvainmedical.be/fr
DOCUMENT 4Mise en évidence expérimentale de l’effet d’un glucocorticoïde de synthèse
Les glucocorticoïdes de synthèse sont utilisés par exemple dans le cadre de certains tests médicaux. Ils forment une famille de molécules dont les effets sur l’organisme sont identiques à ceux du cortisol, un glucocorticoïde naturel.
Une étude a été réalisée sur l’effet de la prednisolone, qui est un glucocorticoïde de synthèse. On a administré à six sujets en bonne santé, formant le groupe test, une solution contenant 10 mg de prednisolone par intraveineuse et à six autres sujets en bonne santé également, formant le groupe témoin, le volume identique sans prednisolone, à 16 h 30. On a ensuite mesuré chez ces sujets la concentration plasmatique d’ACTH à des intervalles de 10 minutes. La concentration de prednisolone des sujets du groupe test a également été mesurée lors de cette expérience. Le graphique ci-dessous présente les moyennes des résultats obtenus.
Évolution des concentrations plasmatiques d’ACTH et de prednisolone chez les sujets
D’après le site europepmc.org
Les clés du sujet
Étape 1. Comprendre le sujet
Il faut d’abord identifier les dérèglements physiologiques de la patiente, c’est-à-dire les dérèglements de son bilan hormonal.
Ensuite, pour expliquer comment le traitement choisi par l’équipe médicale a pu supprimer ces dérèglements, il faut trouver ce qui en est la cause. Certains documents permettent d’émettre deux hypothèses et d’autres permettent de confirmer l’une d’elles.
Il est alors facile de justifier la réussite du traitement.
Étape 2. Exploiter les documents
Le document 1 indique que la personne est diabétique. Un dosage du cortisol et de l’ACTH montre que leur production est anormalement élevée chez la patiente.
Le document 2 révèle l’anomalie anatomique d’une des glandes surrénales de la patiente.
Le document 3 indique que l’opération chirurgicale a consisté à retirer une glande surrénale dont une partie était tumorale. Des observations microscopiques révèlent des caractéristiques fonctionnelles des cellules tumorales.
Le document 4 montre que le glucocorticoïde de synthèse agit sur la sécrétion de l’ACTH hypophysaire de la même façon que le cortisol produit par les glandes surrénales.
Étape 3. Construire la réponse
Introduction
La production de cortisol par les glandes surrénales dépend de l’action de l’hormone hypophysaire ACTH.
À l’aide des informations extraites des documents, nous allons rechercher les causes d’anomalies dans la concentration plasmatique de ces hormones chez une patiente et expliquer comment le traitement appliqué par l’équipe médicale a conduit à la guérison.
I. Anomalies du bilan hormonal (doc. 1 et 4)
A. Concentrations plasmatiques d’hormones (doc. 1)
La patiente présente un diabète sévère puisque sa glycémie est plus de deux fois supérieure à la valeur maximale considérée comme normale. On pense naturellement à des anomalies des concentrations des hormones pancréatiques, insuline et glucagon. Comme les documents ne font jamais allusion à ces hormones, une autre origine est à rechercher.
Le conseil de méthode
Faites toujours une analyse globale de l’ensemble des documents. Ici, cela indique que les hormones pancréatiques ne sont pas en cause.
La quantité de cortisol collecté dans les urines de la patiente est presque quatre fois supérieure à la valeur maximale considérée comme normale. Le cortisol présent dans les urines provient du cortisol présent dans le sang (le plasma sanguin). On peut conclure que durant les 24 heures la concentration plasmatique de cortisol a été nettement supérieure à la normale. Le cortisol est une hormone hyperglycémiante, ce qui explique le diabète de la patiente.
La concentration plasmatique de l’ACTH est plus de quatre fois supérieure à la valeur maximale considérée comme normale. Le bilan hormonal de la patiente est donc caractérisé par des concentrations plasmatiques du cortisol et de l’ACTH très au-dessus des valeurs normales.
B. Effet d’un glucocorticoïde de synthèse sur la concentration plasmatique d’ACTH (doc. 4)
Le conseil de méthode
Pour interpréter les données sur l’ACTH sanguin, exploitez le document 4, en raison du protocole médical particulier pour doser cette hormone.
Le document 1 indique que le dosage sanguin de l’ACTH a été réalisé après injection d’un glucocorticoïde de synthèse.
Le document 4 précise l’action de ce corticoïde sur la concentration plasmatique de l’ACTH. Entre 16 h 30 (moment de l’injection de prednisolone) et 19 heures, la concentration plasmatique de l’ACTH chez les personnes du groupe test a été réduite de moitié (de 10 pg.ml–1 à 5 pg.ml–1). Chez le groupe témoin en revanche, la concentration d’ACTH n’a qu’un peu baissé. Comme les sujets des deux groupes sont en bonne santé et que la seule différence porte sur l’injection de prednisolone au groupe test, on peut conclure que le corticoïde de synthèse a pour effet de diminuer la concentration d’ACTH et donc la sécrétion d’ACTH par l’hypophyse comme le fait le cortisol. C’est ce qu’on appelle la rétroaction négative du cortisol, ou du corticoïde de synthèse, sur l’hypophyse.
C. Précisions sur l’anomalie du bilan hormonal
L’injection du corticoïde de synthèse, dans le cadre du protocole de dosage de l’ACTH du document 1, devrait avoir pour effet d’abaisser considérablement la concentration d’ACTH. Or ce n’est pas le cas.
Le texte du document 1 évoque deux explications possibles : une anomalie de l’hypophyse ou une sécrétion d’ACTH par une tumeur non hypophysaire.
II. Anomalie de l’image du scanner abdominal
Le document 2 permet de comparer l’image du scanner abdominal de la patiente avec celle d’une personne ne souffrant d’aucune pathologie. La seule différence est la présence d’une tumeur de la glande surrénale gauche, située au-dessus du rein gauche, chez la patiente.
La forte concentration plasmatique de l’ACTH serait donc due à une tumeur d’une glande surrénale qui sécréterait beaucoup d’ACTH, hormone qui n’est normalement pas produite par la glande surrénale, qui sécrète du cortisol.
III. Production d’hormones par les cellules de la tumeur
Le document 3 renseigne sur l’histologie de la tumeur et sur son activité endocrine. Les coupes ont été traitées avec des anticorps anti-ACTH et anti-chromogranine marqués. Ces anticorps, en se liant spécifiquement à leur antigène, vont, du fait qu’ils sont marqués, révéler la présence des antigènes dans les cellules. Pour voir où ils se sont fixés, on travaille par comparaison avec l’observation témoin.
L’image de gauche laisse voir des points noirs dans toutes les cellules de la tumeur : ces cellules produisent donc de la chromogranine, ce qui montre leur caractère endocrine.
L’image de droite montre de nombreuses cellules tumorales isolées qui apparaissent foncées, ce qui indique qu’elles synthétisent de l’ACTH.
La tumeur surrénalienne est donc une glande endocrine comme la surrénale, mais son originalité réside dans le fait que certaines de ses cellules sécrètent de l’ACTH, hormone normalement produite par l’hypophyse.
Conclusion
La patiente présente une tumeur de sa glande surrénale gauche. Les cellules de cette tumeur ont une activité endocrine et certaines d’entre elles sécrètent de l’ACTH. L’ACTH produite par la tumeur stimule la production de cortisol par les cellules des corticosurrénales, comme le fait l’hormone hypophysaire. Il en résulte une forte concentration plasmatique de cortisol, qui est à l’origine du diabète de la patiente et d’autres troubles.
Le cortisol exerce une rétroaction négative sur la production d’ACTH hypophysaire, mais non sur la tumeur. Cela aboutit finalement à des concentrations très au-dessus de la normale de l’ACTH et du cortisol.
L’ablation de la surrénale gauche avec sa tumeur a supprimé la cause de la sécrétion « ectopique » (en dehors de son site normal) d’ACTH et de la forte concentration du cortisol, et a donc assuré un traitement du diabète de la patiente. La glande surrénale restante devait suffire à la production des hormones surrénaliennes : cortisol, mais aussi adrénaline.