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Qu'est-ce que l'énonciation ? Comment l'analyser dans un texte ?

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L'énonciation est le fait d'énoncer : un locuteur s'adresse à un interlocuteur, à un moment donné, dans un lieu précis ; ces quatre données définissent une situation d'énonciation.

 

 

Je peux ainsi définir la situation d'énonciation de ce podcast :

- le locuteur, c'est moi qui vous parle d'énonciation ;
- l'interlocuteur, c'est vous qui êtes en train de m'écouter ;
- quant au moment et au lieu, sachez que ce podcast a été produit dans un studio d'enregistrement parisien, au début des vacances d'été.

o Étudier l'énonciation dans un texte peut consister à y repérer des références à la situation dans laquelle il a été produit.
Ceci est chose aisée, par exemple, dans une lettre, un récit autobiographique, un poème lyrique. Ces textes rédigés à la 1re personne font référence en particulier au locuteur qui les a produits.

Mais très souvent un texte semble se développer de manière autonome, sans référence à la situation dans laquelle il a été produit.
Je dis bien " semble " car, en fait, il est possible, dans la plupart des textes littéraires, de trouver des marques de la présence du locuteur - l'auteur du texte.

D'une manière générale, étudier l'énonciation dans un texte littéraire, quel qu'il soit, consiste à repérer des marques de la présence de l'auteur, des indices qui dévoilent sa subjectivité.

o Prenons un exemple : il s'agit d'un texte de Victor Hugo, extrait des Misérables. Nous sommes le 18 juin 1815. C'est la bataille de Waterloo, la dernière bataille de Napoléon. Le texte raconte l'assaut de la cavalerie française commandée par le maréchal Ney. Écoutez plutôt :

" Ils étaient trois mille cinq cents. Ils faisaient un front d'un quart de lieue. C'étaient des hommes géants sur des chevaux colosses. […]
L'aide de camp Bernard leur porta l'ordre de l'empereur. Ney tira son épée et prit la tête. Les escadrons énormes s'ébranlèrent.
Alors on vit un spectacle formidable.
Toute cette cavalerie, sabres levés, étendards et trompettes au vent, formée en colonne par division, descendit, d'un même mouvement et comme un seul homme, avec la précision d'un bélier de bronze qui ouvre une brèche, la colline de la Belle-Alliance, s'enfonça dans le fond redoutable où tant d'hommes déjà étaient tombés, y disparut dans la fumée, puis, sortant de cette ombre, reparut de l'autre côté du vallon, toujours compacte et serrée, montant au grand trot, à travers un nuage de mitraille crevant sur elle, l'épouvantable pente de boue du plateau de Mont-Saint-Jean. […] On croyait voir de loin s'allonger vers la crête du plateau deux immenses couleuvres d'acier. Cela traversa la bataille comme un prodige. "

o Avouez que ce récit ne manque pas de souffle.

Observons-le de plus près par rapport à notre problématique.
Certes, ce récit ne fait pas référence à la situation dans laquelle il a été produit. Pas de " je ", pas de " vous ", pas d'indication sur le lieu et le moment de l'écriture.
Par son caractère très documenté, ce récit s'apparente à un récit historique.
Cependant impossible de ne pas y déceler la présence de l'auteur, de ne pas y relever des traces de subjectivité.
A travers diverses marques textuelles, Victor Hugo exprime l'enthousiasme et l'admiration qu'il éprouve pour cette cavalerie qui donne l'assaut, en une dernière charge héroïque.

o Relevons quelques-unes de ces marques :

- en premier lieu, on peut citer des adjectifs à valeur méliorative ;
l'adjectif géants dans " C'étaient des hommes géants sur des chevaux colosses " (cet adjectif a ici à la fois un sens propre et figuré) ; et puis bien sûr l'adjectif formidable dans " Alors on vit un spectacle formidable " ;
- on relève également plusieurs images qui valorisent la scène et la transfigurent :
" avec la précision d'un bélier de bronze qui ouvre une brèche ",
" deux immenses couleuvres d'acier ",
" Cela traversa la bataille comme un prodige. "

o Toutes ces marques, appelées également marques de modalisation, relèvent de l'analyse de l'énonciation : nous sommes bien en présence d'un auteur, qui cherche à communiquer à son lecteur l'émotion que suscite en lui la fin de l'épopée napoléonienne.

 

 

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