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• Dans l'épopée, en effet, le poète, qui récite une œuvre appartenant à la mémoire collective, et l'auditeur qui l'écoute sont tous deux en position de récepteurs.
• Dans le cas de la poésie lyrique, au contraire, le poète qui dit " je " invite son lecteur-auditeur à participer à son émotion et, donc, à le rejoindre dans sa position de locuteur.
o Le registre lyrique va de pair avec l'expression de sentiments très personnels, tels l'amour, la nostalgie liée à la fuite du temps.
Écoutez cet extrait d'un sonnet de la poétesse Louise Labé, écrit au XVIe siècle.
" Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie.
J'ai chaud extrême en endurant froidure ;
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ai grands ennuis entremêlés de joie.
[…]
Ainsi Amour inconstamment me mène.
Et quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine. "
o Ce poème d'amour appartient bien au registre lyrique. Pourquoi ? Parce qu'il contient les deux caractéristiques indissociables de l'expression d'un sentiment personnel.
• Il y a tout d'abord ces très nombreux pronoms de la 1re personne, je et me, qui font directement référence à la poétesse.
• On relève également de nombreux termes relevant des champ lexicaux du sentiment et de la sensation : " ennuis ", " joie ", " Amour ", " douleur ", " peine " pour les sentiments ; " chaud ", " froidure ", " molle ", " dure " pour les sensations.
o S'ajoutent, à ces deux caractéristiques fondamentales, les figures de style utilisées pour évoquer les sentiments. Citons :
- les hyperboles " je meurs ", " j'ai chaud extrême " qui témoignent de la violence de la passion amoureuse ;
- les antithèses qui illustrent la soudaineté avec laquelle la poétesse passe d'un état d'extrême bonheur à un état de malheur insoutenable : " vis/meurs " ; " me brûle/me noie " ; " chaud/froidure " ; " molle/dure ".
o Terminons avec une rapide mise en perspective historique.
Parce qu'il exalte l'expression des sentiments personnels, le registre lyrique est fortement lié à la littérature du " moi ". C'est pourquoi il est largement représenté dans la poésie romantique, dans l'œuvre de Baudelaire, puis, au XXe siècle, chez des poètes comme Apollinaire, Éluard ou Aragon qui chantent la douleur de vivre et d'aimer.