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Vous devez d'abord garder à l'esprit que les genres favoris du XVIIIe siècle ne sont pas nécessairement ceux que nous avons retenus aujourd'hui. La tragédie reste par exemple le genre théâtral dominant à l'époque, et pourtant, nous ne lisons plus de tragédies du XVIIIe siècle de nos jours.
• Le théâtre, de façon plus générale, connaît une indéniable vitalité. Le genre de la comédie est illustré par les pièces de Marivaux, telles que Le Jeu de l'amour et du hasard ou Les Fausses Confidences, ou par les facéties de Beaumarchais, dans Le Barbier de Séville ou Le Mariage de Figaro. Dans la seconde moitié du siècle, Diderot invente même un nouveau genre théâtral, qu'on appelle le drame bourgeois, ou le drame pathétique. Se démarquant de la tragédie comme de la comédie, il cherche à mettre en scène des personnages de bourgeois, dans le but d'éduquer les spectateurs à la vertu.
• Les Lumières n'innovent pas seulement au théâtre : le roman connaît lui aussi, tout au long du siècle, une période d'intense renouvellement. Recherchant la vraisemblance, les romanciers des Lumières investissent la forme du roman épistolaire ou celle du roman-mémoires. Dans une veine plus comique ou populaire, ils exploitent le genre du roman picaresque ; pour analyser les sentiments et le cœur humains, ils écrivent des romans sentimentaux, voire libertins.
• Enfin, des genres propres au XVIIIe siècle sont inventés : au premier rang desquels le conte philosophique.
Récit relativement bref, et généralement spirituel, il permet de défendre une thèse proprement philosophique sous l'apparence d'une histoire divertissante. Comme vous le savez, ce sont les contes de Voltaire qui en sont les exemples les plus illustres, à commencer par Candide, Zadig ou encore L'Ingénu. Autre genre qui apparaît à la fin du XVIIIe siècle et qui sera promis à un bel avenir, l'autobiographie trouve son premier exemple dans les célèbres Confessions de Rousseau.
Tous ces genres sont le plus souvent mis au service des thèses des Lumières. Ce mouvement se fonde en effet sur un nombre de thèmes relativement réduit, que vous devez évidemment connaître.
• En premier lieu, on peut citer la figure du philosophe. Incarnant le savoir, guidé par la raison, il est bien sûr le personnage principal des Lumières. C'est lui qui peut éclairer le peuple de sa raison et, ainsi, diffuser son savoir. Vous pouvez par exemple penser à la figure de Diderot, qui consacra une bonne partie de sa vie à la direction de L'Encyclopédie. Cet ouvrage célèbre, qui comporte presque 30 volumes, illustre bien les ambitions pédagogiques des Lumières.
• La raison est donc, avec la figure du philosophe, l'autre grand thème de ce mouvement. Capacité qu'a l'homme de réfléchir et de comprendre le monde, elle est l'arme des philosophes dans leurs combats contre l'obscurantisme. C'est en effet au nom de la raison et d'une connaissance rationnelle du monde que les Philosophes attaquent l'Église, accusée d'entretenir le fanatisme religieux, comme l'a fait Diderot dans le Supplément au Voyage de Bougainville, ou Voltaire dans Zadig. C'est encore au nom de la raison que ces mêmes Philosophes dénoncent l'absolutisme monarchique et réclament des libertés politiques, comme Montesquieu dans De l'Esprit des Lois. C'est toujours au nom de la raison qu'ils critiquent l'esclavage, la guerre, les privilèges de la noblesse, comme le fait par exemple Voltaire dans Candide.
• Mais vous ne devez pas pour autant considérer le XVIIIe siècle comme une époque purement rationnelle. Le troisième et dernier grand thème des Lumières est en effet la sensibilité, qui se développe considérablement tout au long du siècle. Le sentiment est ainsi au cœur d'un certain nombre d'œuvres, et les lecteurs ou les spectateurs de cette époque adorent pleurer. C'est ce qui explique par exemple le succès de romans pathétiques tels que Paul et Virginie de Bernardin de Saint-Pierre, ou les tentatives de drame larmoyant au théâtre.
Conclusion
La littérature du XVIIIe siècle est donc plus complexe qu'il n'y paraît d'abord, et il faut faire attention à ne pas la limiter aux clichés les plus simplistes sur les philosophes des Lumières.