Mers et océans sont des territoires où s’affrontent les intérêts géopolitiques et géostratégiques des acteurs étatiques. Malgré des tentatives de coopération internationale, la militarisation des espaces maritimes s’accroît.
IL’appropriation étatique des mers et océans
Mers et océans connaissent une phase de territorialisation croissante et font l’objet de concurrences. Les tensions qui en résultent ont conduit à la définition, en 1982, de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer, dite convention de Montego Bay.
Mot clé
La territorialisation est la suite de transformation d’un espace (ici maritime) en territoire, c’est-à-dire un espace approprié et organisé par une société humaine.
L’espace maritime est découpé en compartiments :
– jusqu’à 12 milles marins (1 mille marin = 1 852 m), l’État riverain exerce une pleine souveraineté (mer territoriale) ;
– jusqu’à 24 milles marins, un droit de contrôle (zone contigüe) ;
– jusqu’à 200 milles marins, il jouit des droits d’exploitation exclusifs des ressources naturelles (Zone économique exclusive ou ZEE).
Au-delà se situent les espaces maritimes internationaux, non appropriés. Les détroits internationaux sont réglementés par des conventions ad hoc. Le droit de passage pacifique y est libre, mais en 2022, suite au conflit ukrainien, la Turquie a fermé le détroit du Bosphore aux navires de guerre de toutes nationalités.
La convention de Montego Bay génère ainsi des différences territoriales considérables entre les États. Les différends relatifs à la délimitation maritime sont donc nombreux et aigus.
IILa recomposition des puissances maritimes
1 La domination américaine
La maîtrise des mers par des groupes aéronavals permet une projection de forces à l’échelle mondiale et le traitement des crises internationales, mais aussi la liberté de navigation. La dimension sous-marine est une composante majeure de la dissuasion nucléaire des grandes puissances.
La puissance maritime américaine reste inégalée depuis 1945 : appuyée sur un réseau mondial de bases et facilités navales, l’US Navy représente à elle seule, avec 230 Mds $ de budget, 11 % des dépenses militaires dans le monde.
Parmi les marines européennes, seuls la France et le Royaume-Uni conservent une capacité de projection. La flotte russe a nettement réduit son format depuis la fin de la guerre froide, et ne dispose plus guère de capacité de projection, comme le montre son rôle très passif en mer Noire contre l'Ukraine.
2 La Chine, nouvelle puissance maritime
La Chine, en plein essor, détient aujourd’hui la 1re flotte de guerre du monde, avec plus de 350 navires de guerre. Elle construit trois navires quand les États-Unis en construisent un, notamment dans l’océan Indien (« collier de perles »). Elle se déploie à présent dans le monde entier.
Mot clé
Le « collier de perles » désigne le chapelet de bases et facilités navales obtenues par la Chine le long de la route qui la relie au détroit d’Ormuz et au pétrole du Moyen-Orient.
IIIDes espaces de tensions et de conflits
En raison de leur caractère stratégique, les espaces maritimes sont de plus en plus souvent le théâtre de tensions, voire de conflits. Les détroits et canaux transocéaniques sont particulièrement concernés.
La guerre lancée par la Russie contre l'Ukraine en 2022 a ainsi fait de la mer Noire un espace de conflit. La flotte russe y a subi des pertes conséquentes, dont son navire-amiral, le croiseur Moskva.
Le détroit d’Ormuz, dans le golfe Persique, est un autre verrou stratégique, qui voit le passage quotidien de 21 millions de barils de pétrole (un tiers du trafic mondial). La Ve flotte américaine, basée à Bahreïn, surveille la zone, notamment face à l’Iran.
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L’appropriation juridique des espaces maritimes
La convention de Montego Bay (Jamaïque) définit un cadre juridique précis des espaces maritimes, de la souveraineté et des utilisations de leurs ressources.
Entrée en vigueur en 1994, ratifiée par la France en 1996, elle rassemble aujourd’hui 168 pays. Mais certains États en sont absents, tels les États-Unis.