Le travail représente un puissant facteur d’intégration sociale, mais ce rôle semble s’affaiblir. Les évolutions récentes du marché du travail accentuent les facteurs de précarité, la précarisation des emplois menant à la précarisation sociale.
I Le travail, facteur d’intégration sociale
1 Une reconnaissance sociale
Le travail exercé est un indicateur du milieu social auquel appartient l’individu (par le biais des catégories socioprofessionnelles) et procure à l’individu un sentiment d’utilité sociale.
Le travail est aussi source de socialisation (par l’intériorisation de normes et de valeurs propres au milieu professionnel) et source de sociabilité (en permettant de nouer de nombreuses relations sociales). Le travail offre une vie ritualisée et rythmée par les obligations professionnelles.
MOT CLÉ
La sociabilité désigne l’ensemble des relations sociales choisies et réciproques que les individus souhaitent entretenir par le biais de discussions, rencontres, activités de loisirs communes, sorties…
2 Une source de revenus
Le travail est également porteur d’intégration économique dans la mesure où il permet de bénéficier d’un revenu (un salaire pour le salarié, un revenu mixte pour un travailleur indépendant).
Grâce à ce revenu, le travailleur peut satisfaire l’ensemble de ses besoins et intégrer la société de consommation. Dans une société qui connaît une forte division du travail et une forte spécialisation des activités et des travailleurs, l’acte de consommer est nécessaire. De plus, adhérer aux normes collectives de consommation permet de s’identifier, à travers ces pratiques, à ses semblables.
3 Une protection sociale
Le travail, dans les pays développés, permet également de bénéficier d’une couverture sociale qui assure au travailleur, ainsi qu’à sa famille, une relative sécurité face à certains risques sociaux (chômage, maladie, accident, vieillesse).
Cette couverture se caractérise par la distribution de revenus sociaux (pensions de retraite, allocation-chômage, remboursement de dépenses de santé), financés par un prélèvement sur les revenus d’activité qui alimente le budget de l’État ou des organismes de la Sécurité sociale.
II Les effets de l’évolution de l’emploi
1 Le chômage affaiblit les liens sociaux
Le chômage persistant ainsi que l’alternance de périodes d’emploi et de chômage entraînent une perte de revenu, malgré les mécanismes d’indemnisation.
La perte d’emploi génère une perte de repères et des rythmes de travail, une rupture de sociabilité, ce qui peut être source d’isolement, d’affaiblissement des liens sociaux et de remise en cause du statut social (perte de dignité au travail et d’utilité sociale, risque de stigmatisation).
2 La précarisation des emplois fragilise l’intégration sociale
Le besoin de flexibilité du marché du travail a fait évoluer les normes du salariat avec le développement de formes particulières d’emploi. Le travail ne fournit plus à l’individu les garanties de revenu, d’accès à la consommation, au logement et au crédit. Il existe ainsi de plus en plus de travailleurs pauvres dont les revenus irréguliers et/ou insuffisants ne permettent pas de vivre décemment ou de faire des projets.
Les contrats précaires plus instables compliquent également l’intégration dans des collectifs de travail (travail en équipe, organisations syndicales).
La polarisation de la qualité des emplois aggrave les inégalités entre emplois très qualifiés et peu qualifiés, que ce soit en termes de salaires ou d’exposition aux difficultés économiques que peut connaître l’entreprise.
Globalement, la rupture de liens relationnels et professionnels peut conduire à l’exclusion sociale.
Zoom
L’augmentation de la précarité de l’emploi
Source : Calculs du Centre d’observation de la société, d’après l’Insee.
Le taux de précarité atteint 13,2 % en 2021 contre 11,2 % en 2002 et demeure plus important chez les femmes, les jeunes et les individus peu qualifiés.