Fiche de révision

Peut-on faire l'inventaire de la nature ?

Ce n'est pas de la nature, infiniment riche et variée, qu'on dresse l'inventaire, mais plutôt de nos connaissances sur celle-ci. Mais leur extension rapide permet-elle encore de les recenser après la révolution scientifique moderne ?

I Le développement rapide de la science

1 Le projet cartésien

Au cœur de la révolution scientifique moderne, Descartes échafaude le projet d'un savoir total. Il considère la science comme un système cohérent et en expansion, tel un arbre dont les branches partent d'un même tronc : la physique (du grec phusis, « nature »).

Il écrit dans les Principes de la philosophie (1644) : « il n'y a aucun phénomène de la nature dont l'explication ait été omise en ce traité ». ­L'explication par « figures et mouvements » rend compte en principe de la totalité des phénomènes naturels. Descartes prétend aussi à l'exhaustivité dans la connaissance de la nature humaine dans son traité d'anatomie la Description du corps humain et de toutes ses fonctions (1648).

2 Une spécialisation inéluctable

La figure du savant universel décline toutefois au profit de celle du spécialiste, car ces progrès rapides vont dans le sens d'une séparation des savoirs. Ainsi, la biologie émerge comme discipline indépendante de la physique.

Forgé par Lamarck à partir du mot grec bios (« vie »), le terme « biologie » désigne la science des êtres vivants. On en trouve les prémisses dans Les Genres des plantes (1737), où Linné inventorie environ 6 000 espèces végétales et 4 500 animales selon une nomenclature binominale, ou dans la monumentale Histoire naturelle (36 volumes, 1749-1789) de Buffon, qui prétend « former une collection bien rangée de tous les ouvrages de la Nature ».

Mot clé

La nomenclature binominale désigne chaque espèce par une combinaison de deux mots, le premier indiquant le genre et le second l'espèce proprement dite (ex. : « Homo sapiens », « Canis lupus »).

II De l'inventaire à la critique

1 Les projets encyclopédiques

Leibniz déplorait que nos connaissances soient comme « une grande boutique (…) sans ordre et sans inventaire » (Discours touchant la méthode de la certitude et l'art d'inventer, 1690). L'anglais Chambers tente d'y remédier dans sa Cyclopaedia (1728), dictionnaire universel des sciences et des arts.

Mot clé

Du grec kuklos (« cercle ») et paideia (« connaissance », « éducation »), une encyclopédie offre un exposé complet de l'état des savoirs.

Cependant, une compilation de tous les savoirs ne peut plus être le fait d'un seul homme, mais une entreprise collective de plus grande envergure : au XVIIIe siècle, Diderot décrit L'Encyclopédie comme un « tableau général des efforts de l'esprit humain dans tous les genres et dans tous les siècles » (Prospectus de l'Encyclopédie, 1750) .

2 Les limites du savoir

L'état de nos connaissances évoluant en permanence, toute entreprise de ce genre devient vite périmée. C'est pourquoi Diderot juge que L'Encyclopédie vise surtout à combattre les préjugés en réduisant l'ignorance. L'omniscience nous est impossible, mais on peut du moins « changer la façon commune de penser » (article « Encyclopédie », 1755).

Outre que la nature est d'une richesse inépuisable, le projet d'en faire l'inventaire se heurte aussi aux limites de la connaissance possible  : notre raison ne nous permet pas de tout comprendre, et nos sens ne nous dévoilent pas le fond des choses. Aussi Kant pose-t-il comme préalable à toute description de la nature une enquête sur notre pouvoir de connaître (Critique de la raison pure, 1781-1787).

L'essentiel

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