Fiche de révision

Quelles séductions la fiction exerce-t-elle ?

Qui n'a jamais été aimanté par une fiction ? Du latin fingere (« façonner, feindre »), la fiction, si fréquente en littérature, a partie liée avec la séduction ; elle entraîne le lecteur dans l'imaginaire. Comment expliquer son si puissant attrait ?

I Un goût immémorial pour les histoires

1 Des récits qui repoussent les limites du réel

La civilisation humaine se bâtit culturellement autour d'une tradition orale de fictions partagées : les mythes. Ces histoires fondatrices pulvérisent les contours du réel : ainsi des destins d'Icare brûlant ses ailes en volant vers le Soleil, ou de Prométhée dérobant le feu aux dieux pour le donner aux hommes, racontés par Ovide dans Les Métamorphoses.

L'esprit humain est friand de mondes imaginaires, propices à la rêverie. « Chacun songe en veillant, il n'est rien de plus doux », rappelle La Fontaine dans sa fable « La Laitière et le Pot au lait ».

Dans la fiction, l'imagination est reine : elle permet l'exploration des possibles en bousculant les limites de la raison. Dans Pantagruel de Rabelais, le narrateur pénètre à l'intérieur de la bouche du géant, y trouvant un formidable monde à part entière.

2 Un pouvoir captivant redoutable

Au début du XVIIIe siècle, Antoine ­Galland traduit le recueil de contes orientaux des Mille et Une Nuits. Le pouvoir de la fiction sur les lecteurs y est mis en abyme à travers la figure de la conteuse Shéhérazade, qui sauve sa vie en envoûtant chaque soir un sultan grâce à ses histoires captivantes.

À noter

En 1976, le psychanalyste Bruno Bettelheim souligne l'importance des contes de fées (et notamment ceux rassemblés par Charles Perrault) pour la constitution de l'enfant.

Faire appel à l'imaginaire est un moyen efficace de capter l'attention : La Fontaine le souligne dans « Le Pouvoir des fables », où un orateur ne parvient à solliciter l'attention des Athéniens qu'en amorçant une fable propre à les intriguer. Le fabuliste le concède lui-même : « Si Peau d'âne m'était conté, j'y prendrais un plaisir extrême. »

II Une stratégie pour donner à penser

1 Toucher l'imaginaire pour emporter l'adhésion

La fiction se décline en une infinité de formes, de l'apologue aux récits de toutes sortes, en passant par le théâtre.

Mot clé

L'apologue est un court récit de fiction qui sert à la transmission d'une leçon morale, comme la fable, le conte ou la parabole.

L'argumentation indirecte transmet des idées via la fiction : le récit devient prétexte à réflexion. L'argumentation perd alors en rigueur démonstrative ce qu'elle gagne en persuasion, en s'adressant à l'imagination et à la sensibilité plus qu'à la raison.

La fiction marque les esprits. Dans son Histoire de Rome, Tite-Live évoque l'orateur Ménénius Agrippa qui raconte la révolte stérile des organes contre un estomac jugé à tort inactif et tyrannique : il montre que le corps social est un ensemble aussi harmonieux que le corps humain, malgré ses injustices apparentes.

2 Faire passer des idées de manière détournée

La fiction permet d'aborder des questions existentielles sous un angle plus accessible. Voltaire, dans son conte Candide, fustige l'optimisme hérité du philosophe Leibniz (le « meilleur des mondes »). La fiction devient une arme au service du combat philosophique.

En empruntant le détour de la fiction, l'écrivain peut formuler des idées difficilement exprimables, voire sujettes à la censure. Sous le couvert plaisant de l'imagination, les Lettres persanes de Montesquieu ciblent bel et bien la monarchie absolue.

De même, la République des oiseaux, imaginée par Cyrano de Bergerac dans ses États et Empires de la Lune, choisit pour souverain le plus inoffensif d'entre eux, une colombe, avide de concorde et de douceur : le contraste souligne l'autoritarisme brutal de la monarchie française.

L'essentiel

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