L'art oratoire permet de persuader efficacement un auditoire. Quels genres de discours conduit-il à composer et quels sont les sujets qui y sont abordés ?
I Le discours persuasif
1 Éloquence et rhétorique
La finalité de l'art oratoire est de persuader une personne ou un auditoire, d'une certaine idée ou opinion, par le moyen de la parole (en latin, orare signifie « parler ») : il faut alors, comme on dit, « trouver les mots », toucher les autres par son discours.
L'éloquence est la capacité à s'exprimer de manière persuasive. Elle dépend de multiples facteurs : le tempérament ou l'histoire d'un individu, sa relation avec ceux qui l'écoutent, le sujet abordé, les circonstances, etc.
La rhétorique est la connaissance des règles du discours, permettant de s'adresser avec élégance et efficacité à un auditoire. Comme tout art au sens où l'entendaient les Anciens (ars en latin, teknè en grec), c'est une activité qui produit un résultat (la persuasion) sur la base d'un savoir (les règles du discours).
À noter
Celui qui pratique l'art oratoire est appelé orateur (du latin orator) ou rhéteur (du grec rhètor).
Dans l'Antiquité, les femmes, exclues de la citoyenneté, sont également exclues de cette pratique.
2 Objet et forme du discours
La rhétorique vise avant tout à établir une relation entre la personne qui parle et celles à qui elle s'adresse. L'objet du discours (ce dont on parle), passe alors au second plan par rapport à la forme du discours.
Cependant, les outils rhétoriques mobilisés varient selon l'objet du discours : l'utilité ou l'inutilité de certaines décisions, la justice ou l'injustice de certains actes, la beauté ou la laideur d'un genre de vie. Aristote distingue ainsi trois genres dominants de discours, selon la visée et le contexte.
Mot clé
Aristote (384-322 av. J.-C.) a codifié durablement les règles de l'art oratoire dans la Rhétorique.
II Les contextes de l'art oratoire
1 Les trois genres de l'art oratoire selon Aristote
Le genre délibératif correspond à ce que nous appelons aujourd'hui le discours politique : engageant l'avenir, il porte sur des décisions prises par des assemblées de citoyens, et qui s'avéreront utiles ou nuisibles à la communauté.
Le genre judiciaire répond à la nécessité de juger certaines actions passées en évaluant si elles sont justes ou injustes. Cela correspondrait aujourd'hui au réquisitoire prononcé par le procureur (l'accusation) ou à la plaidoirie de l'avocat (la défense).
Le genre épidictique est propre aux cérémonies et commémorations : l'orateur loue la beauté de certains engagements, par exemple lors d'un éloge funèbre, ou dénonce au contraire leur laideur. Dans les deux cas, l'enjeu est le présent pour une communauté qui cherche à se souder davantage ou à mieux définir ses valeurs et son identité.
2 La hiérarchie des genres
Pour Aristote, le genre délibératif est le plus noble car l'homme y réalise pleinement sa nature d'« animal politique », voué à chercher le bonheur dans l'accord avec ses concitoyens. Le genre judiciaire n'existe que pour régler les conflits ou réparer des erreurs. Quant au genre épidictique, il est plus « littéraire » et proche du spectacle, donc plus exposé à des dérives.
Toute cette classification est inséparable du contexte démocratique de la Cité athénienne. C'est d'abord dans les tribunaux que l'art oratoire s'est développé, avant de s'installer dans les assemblées politiques et les réunions de citoyens. De grands orateurs et hommes d'État tels que Périclès ou Démosthène s'adressaient alors aux citoyens, qui participaient de façon très directe et presque quotidienne aux affaires publiques.